Une relation à trois

L'attitude des parents ne possède pas d'impact direct sur le bien-être des enfants et le chemin emprunté par ces derniers ne dépend pas seulement...

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David-Yits'haq Trauttman

Posté sur 06.04.21

14 chévat 5769 – 8 février 2009

L'orgueil est un mal certain. Selon l'approche non spirituelle, la personne orgueilleuse est celle qui se vante d'une bonne action qu'elle porte à raison à son crédit. Dans le cas où la personne s'accorde un mérite auquel elle n'a pas droit, elle ment. Ceci est la différence majeure entre une personne orgueilleuse et une menteuse : la première possède toutes les raisons de penser que son attitude à permis l'aboutissement heureux d'un évènement spécifique, tandis que l'autre l'imagine entièrement.

Selon l'approche spirituelle, la personne orgueilleuse et la menteuse sont la même. Dans les deux cas, elles oublient l'élément essentiel sur lequel repose le monde : D-ieu. En d'autres termes, il est impossible de s'accorder un quelconque mérite dans ce monde car tout dépend de la décision du Créateur et l'être humain possède un impact sur son environnement équivalent à la force d'une fourmi face à un éléphant.

D-ieu : le disque dur de notre environnement

Nous pouvons comparer l'environnement dans lequel nous évoluons à un ordinateur. Composé de plusieurs éléments, tous possèdent une fonction définie à l'avance. La carte vidéo sert à visionner des films ; la mémoire permet de stocker des données ; le clavier à frapper des textes… Même si chaque élément est essentiel, rien ne peut se passer sans la présence du disque dur. Si celui-ci s'arrête de fonctionner, c'est l'ordinateur entier qui devient inutilisable. Qu'on le veuille ou non, le disque dur représente le cerveau de l'ordinateur et sans sa présence, rien n'est possible.

Dans notre vie, nous pensons souvent que notre rôle est celui du disque dur. Face à tel évènement, nous agissons de telle sorte et nous voyons sous nos yeux les conséquences de notre action. Même si ce schéma semble simple et évident… il est mensonger. Aussi longtemps que nous n'avons pas intégré le concept qu'absolument rien ne peut arriver dans le monde sans que D-ieu le veuille, nous commettons une faute grave. De plus, lorsque cet oubli nous touche au plus près et nous amène à penser que nos actions ont un impact direct sur notre environnement, nous sommes les victimes d'un orgueil à la mesure de cette fausse croyance.

Il est possible de regrouper les différentes attitudes dans ce domaine en trois catégories. La pensée occidentale est celle où l'homme croit être “le maître à bord”. La philosophie dominante est celui du “je désire, je fais, j'obtiens”. Ceci représente l'orgueil le plus absolu qu'il soit et il n'est pas étonnant que les sociétés occidentales soit celles où le spirituel fait le plus défaut. À l'autre extrémité, la pensée du monde oriental est celle du “rien ne sert de vouloir changer le cours des choses, tout est écrit à l'avance.” Cette pensée représente le reniement le plus absolu de l'essence même de l'être humain. Entre les deux, la pensée juive nous apprend que l'être humain a l'obligation de faire de son mieux… en sachant qu'en fin de compte, tout dépend de D-ieu. Nous pouvons éventuellement choisir ce que nous désirons être dans un ordinateur, à l'exception du disque dur. Ce dernier est le fruit défendu qu'il nous est interdit de consommer.

Entre gros sabots et négligence

De quelle façon pouvons-nous mettre ce concept abstrait en pratique dans notre vie quotidienne ? Afin de répondre à cette question, nous prendrons une des tâches les plus ardues que la plupart d'entre nous devons remplir : celle de parents responsables de l'éducation de leurs enfants.

Selon la pensée occidentale, une éducation réussie dépend avant tout de la capacité des parents à vouloir investir leur temps, leur argent, leur intelligence à faire de leurs enfants des personnes droites. Selon la pensée orientale, c'est le “destin” de chaque personne qui décidera avant tout du chemin que chacun et chacune empruntera. La tâche des parents juifs est plus subtile et plus difficile… mais elle peut aboutir à donner aux parents une satisfaction sans commune mesure à celle des deux autres modes de pensée.

L'obligation des parents – c'est-à-dire notre devoir de donner les meilleures armes à nos enfants pour grandir sainement – consiste à donner le meilleur d'eux-mêmes. Certes, une famille riche qui peut s'offrir les meilleures écoles juives doit le faire ; cependant, la famille pauvre qui doit se contenter d'un enseignement “standard” pour ses enfants doit être convaincue qu'elle offre les armes optimales dont sa progéniture a besoin. Croire qu'en envoyant ses enfants dans une meilleure école ces derniers pourraient mieux réussir dans la vie, revient à dire au Maître du monde – que D-ieu nous préserve – qu'Il est injuste à notre égard.

La personne qui possède des moyens importants et qui en fait bénéficier ses enfants en leur offrant une éducation de quatre étoiles ne doit pas commettre l'erreur de penser que ce sont ces écoles qui permettront à sa progéniture de devenir des personnes honorables. Ceci équivaut à chausser les sabots de l'orgueil. D'autre part, les personnes qui économisent leur argent sur le dos de leurs enfants sont négligentes et elles devront rendre compte de leur attitude. Pour autant, dans ce cas aussi, les enfants ne pâtiront pas de cette négligence. C'est que D-ieu avait décidé à l'avance que les grandes écoles ne conviendraient pas à ces enfants.

À chacun son ouvrage

Ainsi décrite, la situation devient plus claire. D'un côté, les parents doivent faire leur maximum, selon le niveau de leur finance, de leur intelligence… De l'autre, les enfants doivent tirer le plus grand profit des conditions dans lesquelles ils vivent et étudient… selon leur intelligence, leurs capacités… L'attitude des parents ne possède pas d'impact direct sur le bien-être des enfants et le chemin emprunté par ces derniers ne dépend pas seulement de l'environnement dans lequel ils évoluent. L'image de cette situation est celle d'une relation à trois, dans laquelle chaque personne fait de son mieux et où D-ieu décide de la tournure des évènements.

Si chaque personne se concentre sur la tâche qui lui incombe, elle peut plus facilement trouver satisfaction dans ce qu'elle fait. Peu importe si ce qui se déroule sous ses yeux lui semble positif ou pas, elle sait que telle est la Volonté divine et elle en accepte le contenu avec une émouna (foi) complète.

Afin de bien comprendre la nature exacte de cette relation, il est possible de prendre deux exemples extrêmes. Un enfant est élevé dans une famille – que D-ieu nous préserve – où l'éducation qu'il reçoit est catastrophique : ses parents se disputent continuellement, les enfants sont laissés dans la rue, l'alimentation de base n'est pas assurée… Pourtant, cet enfant devient un grand érudit en Tora et le monde entier salue son caractère exemplaire.

À l'opposé de cette situation, le fils d'une famille riche a passé toutes ses années dans les meilleures écoles et avec les meilleurs tuteurs possibles. Rien ne lui était refusé et la réussite semblait lui être à portée de main. Pourtant, cet enfant – que D-ieu nous préserve – a mal tourné et il est devenu le plus grand malfaiteur au monde.

Dans le premier cas, D-ieu a récompensé les parents qui faisaient des efforts quasi inhumains pour se contrôler… même s'ils y arrivaient rarement. Toutes les nuits, le père pleurait devant D-ieu face à son incapacité à contenir ses colères quotidiennes. Tous les jours, la mère pleurait sur ses désirs malsains qu'elle n'arrivait pas à dominer. Pendant ce temps, l'enfant faisait de son mieux en étudiant avec le maximum que ses forces lui permettaient.

Dans le deuxième cas, les parents n'ont guère prêté attention à leur progéniture. Ils ont commis l'erreur de croire que l'argent peut tout acheter, y compris la droiture morale. Même si leur chéquier et leur carte de crédit étaient régulièrement sollicités, leur cœur était ailleurs. Les deux parents n'avaient aucune volonté à passer du temps avec leurs enfants, à leur dire combien ils les aimaient, combien ils étaient importants à leurs yeux… Leur négligence a été grande. Pendant ce temps, l'enfant s'est laissé dormir sur son épais matelas d'euros. Ses mauvaises habitudes se sont développées et il ne s'y est guère opposé. En fin de compte, le style de vie qu'il a choisi est celui des pervertis et des dépravés.

En conclusion, que doit-on faire ?

Notre tâche consiste à devenir de meilleures personnes, un peu plus chaque jour. À cette fin, nous devons faire appel à D-ieu, tous les jours. Nous devons lui crier notre volonté de nous rapprocher de Lui, d'acquérir de meilleures attitudes, de vouloir mieux faire…

Pour l'éducation de nos enfants, nous devons être à leur écoute, nous entourer des meilleurs conseils qu'il nous est possible de trouver. Si nous faisons “nos devoirs”, nous aurons fait ce que le Maître du monde attend de nous. Par la suite, ce que enfants deviendront sera de leurs responsabilités et pas de la nôtre.

Intérioriser ce concept n'est superflu. Dans de nombreux cas, il peut – littéralement – sauver la vie de parents inquiets de voir leurs enfants ne pas les écouter, prendre un chemin inquiétant… que D-ieu nous préserve. Comprendre la façon donc fonctionne notre monde permet également de mieux saisir ce qui semble parfois difficile à expliquer : les différences importantes de comportement d'un enfant à l'autre au sein d'une même famille. L'exemple le plus illustre est celui du Roi David ; celui-ci eut deux fils : un Tsadiq, le Roi Chlomo (Salomon) et un fils particulièrement méchant, Avchalom. Dans les deux cas, ils avaient reçu une éducation d'un haut niveau – pourrait-il en être autrement venant du Roi David – et chacun en fit ce qu'il voulut. Dans les deux cas, le Roi David n'eut pas à se sentir autrement responsable de “l'échec” d'un de ses fils.

Maître du monde, aide-nous à concentrer nos efforts à nous améliorer et à devenir des meilleures personnes. Préserve-nous du sentiment de désespoir qui pourrait nous atteindre lorsque nous constatons que les évènements qui nous entourent ne prennent pas la tournure que nous souhaiterions. Amen.

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