Chemita et foi

La femme de Daniel éprouva un sentiment de malaise : au lieu de servir l'habituel plat de poisson en l'honneur de Chabath, elle n'avait qu'une simple boîte de sardines...

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Debbie Shapiro

Posté sur 06.04.21

Le fils d'une de mes amies – appelons-le Daniel – vit dans un petit village, quelque part en Israël. Daniel est un “avrekh” (une personne qui étudie la Tora à temps plein). Quant à sa femme, elle s'occupe du bien-être de leurs enfants.
 
Comme vous pouvez l'imaginer, Daniel est loin d'être riche. De fait, avoir à manger représente un pari quotidien à relever.
 
Un vendredi après-midi, la femme de Daniel – appelons-la Rivqa – éprouva un sentiment de malaise au fond d'elle-même : au lieu de servir l'habituel plat de poisson en l'honneur de Chabath, elle aurait à poser sur la table le contenu d'une simple boîte de sardines. Cette semaine-là, le budget de la famille était encore plus serré que d'habitude. Ainsi, chaque membre de la famille aurait une sardine à manger et pas une de plus. De plus, pour les invités attendus, le régime serait le même.
 
Dans le petit village où vivent Daniel et Rivqa, les femmes préparent – à tour de rôle – les repas pour les étudiants de la yéchiva locale (établissement où on étudie la Tora).
 
Cette semaine-là, c'était le tour de Rivqa d'aller préparer ce qui serait le repas du vendredi soir des élèves de la yéchiva. En arrivant à l'établissement d'enseignement, Rivqa aperçut la femme du roch yéchiva (le principal) porter un large carton qui semblait relativement lourd. “Rivqa, regarde ce que j'amène : un carton rempli de saumon. Une personne du marché en a fait don à la yéchiva pour ce Chabath. Les saumons sont splendides est tellement nombreux… Cela te ferait-il plaisir d'en prendre quelques-uns pour toi et ta famille, en l'honneur du Chabath ?”
 
Ce Chabath, toute la famille de Rivqa – ainsi que ses invités – se régalèrent d'un saumon frais au citron.
 
Un autre jour, Daniel se dirigeait vers le magasin de bricolage afin d'y faire réparer son ventilateur qui rendait la chaleur un peu moins insupportable dans son appartement. Alors qu'il se trouvait à quelques pas du magasin, il rencontra le roch yéchiva, accompagné d'un homme que Daniel ne connaissait pas. “Cette personne veut faire un don important à un des étudiants de notre établissement” déclara le roch yéchiva à Daniel. “Tu es le premier que nous croisons.” “Merci, mais j'ai tout ce qu'il me faut” répondit Daniel.
 
Presque en blaguant, il poursuivit : “Peut-être, cette personne sait-elle réparer un ventilateur ?” Au lieu de réparer le ventilateur, la personne offrit un appareil d'air conditionné à Daniel. À compter de ce jour-là, les jours d'été sont devenus beaucoup plus supportables dans le petit appartement de Daniel et de Rivqa.
 
Chaque personne qui vit en Eretz Israël (en Terre d'Israël) peut raconter un nombre sans fin d'histoire de “hachga'ha pratit ” (de Providence divine). Toutes les personnes qui vivent ici, ont vécu cette aventure : lorsque la situation semblait désespérée, lorsque aucun espoir se semblait en vue, soudainement, une personne – venue de nulle part – est apparue et – tel un ange libérateur – nous a fourni ce qu'il nous fallait exactement. Je me souviens d'une semaine où je n'avais pas d'argent pour acheter à manger pour le Chabath.
 
Le jeudi après-midi – lorsque je commençais sérieusement à penser à faire inviter toute ma famille par un de nos voisins – la sonnerie de la porte retentit. J'ouvrai la porte et un homme que je ne connaissais pas me dit : “Je vous ai cherché depuis plusieurs jours.” Il me tendit alors un billet de cent dollars (une véritable fortune, il y a vingt-cinq ans) en m'informant : “Il a quelques années, j'ai emprunté cette somme à votre mari et je n'ai jamais pu la lui rembourser. Aujourd'hui, je remets les comptes à zéro. Vous lui direz merci de ma part. Chabath chalom !”
 
En deux secondes, l'homme avait disparu sans laisser son nom, ni son adresse.
 
Cette année – 5768 (2007/2008) – est l'année de “chemita”. Qu'est ce que la chemita ? La Tora nous apprend : “L'Éternel parla à Moïse au mont Sinaï…: 'Lorsque vous serez entrés dans le pays que Je vous donne, la terre sera soumise à un chômage en l'honneur de l'Éternel. Six années tu ensemenceras ton champ, six années tu travailleras ta vigne et tu en recueilleras le produit ; mais la septième année, un chômage absolu sera accordé à la terre, un Chabath en l'honneur de l'Éternel. Tu n'ensemenceras pas ton champ, ni ne tailleras ta vigne.
 
Le produit spontané de ta moisson, tu ne le couperas point et les raisins de ta vigne intacte tu ne les vendangeras point ; ce sera une année de chômage pour le sol'”. (Vayiqra-Lévitique 25 : 1-5)
 
Toutes les sept années, nous avons l'obligation – en Eretz Israël – de laisser la terre se reposer. De quelle façon une société qui dépend toute l'année de son agriculture peut-elle survivre pendant une année entière sans travailler la terre ? La Tora continue : “Exécutez Mes édits, observez et pratiquez Mes lois et vous demeurerez dans le pays, en sécurité.
 
La terre donnera ses fruits, dont vous vous nourrirez abondamment et vous y résiderez en toute quiétude. Et si vous dites : 'Qu'aurons-nous à manger la septième année, puisque nous ne pouvons ni semer, ni rentrer nos récoltes ?' Je vous octroierai Ma bénédiction dans la sixième année, tellement qu'elle produira la récolte de trois années.” (Vayiqra 25:18-21)   
 
Hachem nous promet que si nous respectons Sa mitswa de chemita, Il subviendra à nos besoins. Chaque année de chemita, il existe un nombre incroyable d'histoires qui racontent la façon dont Hachem est intervenu pour assurer un revenu minimum aux fermiers et agriculteurs qui ont mis leur source de revenu en danger en laissant reposer leur terre pendant une année entière. Lorsque nous croyons en Hachem, Hachem subvient à nos besoins.
 
Puisque nous prenons conscience que Hachem est là pour assurer notre revenu, nous sommes contents de ce que nous avons, peu importe ce que nous possédons. Nous sommes convaincus qu'au-delà notre compréhension, ce qui est à notre disposition représente exactement ce dont nous avons besoin !
 
Chers lecteurs, tandis que vous lisez ces quelques lignes, je peux presque entendre les questions qui vous viennent à l'esprit : “Si nous disposons de tout ce dont nous avons besoin, pour quelle raison devrions-nous faire un effort particulier afin d'améliorer notre sort ?”; “Si je ne dispose pas d'un appareil d'air conditionné, cela veut-il dire que je ne mérite pas d'en avoir un ? Dans ce cas : pourquoi ?”; “Si je n'ai qu'une seule belle robe pour le yom tov (jour de fête), peut-être ne devrais-je pas en acheter une seconde ?” Etc.
 
Pour répondre à ces questions, il me faut utiliser la méthode normande : “Peut-être que oui… peut-être que non.” Je m'explique : si nous pensons que nous devons avoir quelque chose que nous ne possédons pas, nous devons sans doute faire des efforts – normaux – pour l'obtenir. Ainsi, il n'est sans doute pas conseillé d'accumuler sans fin les heures supplémentaires dans le but de se payer un nouvel objet. Cela se ferait au détriment de notre famille, du bien être de notre conjoint et de la santé morale de nos enfants.
 
Si après avoir essayé – dans une certaine mesure – nous constatons que nous n'avons pas obtenu ce que nous désirions, cela veut peut-être dire que nous ne devons pas (encore ?) l'obtenir. Dans la mesure où nous savons que Hachem est celui qui nous fournit ce dont nous avons réellement besoin, s'il nous manque quelque chose et que nous n'arrivons pas à l'obtenir, c'est que nous n'en n'avons pas vraiment besoin !
 
De nombreuses personnes pensent que si elles ne travaillaient pas le Chabath, elles ne seraient pas capables de “boucler” leur budget. Cependant, nous savons que les revenus de chaque personne sont fixés le jour de Roch Hachana (le jour de l'an juif) et que les bonnes actions que nous avons effectuées pendant toute l'année sont le facteur essentiel pour déterminer si nous recevrons une bénédiction du montant décidé à Roch Hachana.
 
Par exemple : Reuven a gagné 20 000 euros cette année ; cependant, il a dépensé la majorité de ses revenus en réparations imprévues pour sa maison, en une opération chirurgicale onéreuse et pour remplacer sa voiture dont le moteur a inexplicablement décidé de ne plus tourner. D'autre part, le voisin de ReuvenYa'aqov – a gagné seulement 12 000 euros ; cependant, sa maison n'a pas eu besoin de réparations majeures ; il n'a pas rencontré un seul médecin pendant toute l'année et sa voiture fonctionne à merveille.
 
Conclusion : une personne peut travailler le Chabath pour gagner plus d'argent et… elle pourrait bien en gagner effectivement plus.
 
Cependant, en fin de compte, c'est Hachem qui décide du montant – et des bénédictions – qui seront réellement les nôtres.
 
C'est exactement cela qui fait la force extraordinaire de la chemita. En laissant reposer notre terre pendant une année entière, nous déclarons ouvertement et sans ambiguïté notre emouna (foi) en D-ieu : nous avons confiance que Hachem nous fournira ce dont nous avons réellement besoin. Même si nous faisons le maximum d'efforts pour devenir une meilleure personne – et que nous pouvons quelque fois y parvenir – nous savons qu'en fin de compte, notre succès dépend entièrement de Hachem.
 
C'est D-ieu qui nous a ordonné de laisser notre terre se reposer pendant l'année de chemita ; c'est également D-ieu qui décidera de notre revenu cette année. Comme toutes les autres années.
 
Que tout le peuple d'Israël puisse être inscrit dans le livre de la vie. 

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