Croire en D-ieu et en les Tsadiqim – Béchala’h

Le Talmud enseigne que si on a un malade chez soi, on doit consulter un Sage. Comment les enfants d’Israël purent-ils donc croire en D-ieu ? Par l’intermédiaire du Tsadiq.

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le Rav David Hanania Pinto

Posté sur 06.04.21

La Tora (Bible) écrit que “lorsqu’Israël vit la main puissante que l’Éternel avait dirigée contre les égyptiens, il crut en l’Éternel et en Moïse, Son serviteur” (Exode 14:31). Pourquoi la Tora ne se contente-t-elle pas de mentionner : “Le peuple crut en l’Éternel ? Pourquoi a-t-elle ajouté : “et en Moïse Son serviteur” ?

Nous savons que tous les miracles accomplis en Égypte et sur la Mer Rouge, ont été l’œuvre exclusive de D-ieu, en particulier la plaie des premiers nés. C’est ainsi qu’il est écrit : “D-ieu nous a fait sortir d’Égypte, non par l’intermédiaire d’un ange, d’un séraphin ou d’un émissaire, mais le Saint, béni soit-Il, nous en a fait sortir Lui-même, dans toute Sa gloire” (Hagada de Pessa’h).
 
En outre, faisant fi de l’argumentation de l’ange d’Égypte, l’Éternel sépara la Mer Rouge afin que les enfants d’Israël croient en Lui. Pourquoi donc le nom de Moïse est-il mentionné, avec insistance même, dans le verset ?
 
D’autre part, dans la section hebdomadaire précédente (Exode 12:2), l’Éternel dit à Moïse et Aharon : “Ce mois-ci sera pour vous le commencement des mois.” Pourquoi cette appellation ? Parce que ce fut la première mitswa imposée aux enfants d’Israël (Yalqouth Chimoni, Genèse 187).
 
Enfin, comme on l’a vu, l’Éternel donna aux enfants d’Israël deux mitswoth supplémentaires, le sang de la circoncision et celui du sacrifice de Pessa’h, afin qu’ils méritent la Rédemption. Nous avons vu que les enfants d’Israël étaient stricts dans l’observance des principes de base (ne changeant ni de nom, ni de vêtement ni de langage, et gardant leur pureté). Cela ne suffisait-il pas pour mériter la délivrance, et fallait-il ajouter encore deux mitswoth ?
 
En fait, ce qui compte, ce n’est pas tellement l’acte lui-même, mais les intentions profondes qui le motivent. On peut par exemple prier trois fois par jour, sans ressentir la présence du Saint, béni soit-Il, dans la synagogue (cf. Bérakhoth 8a ; Zohar I, 105a) et sans se concentrer sur les mots de la prière. Car on sait que les forces du mal se nourrissent d’une prière récitée sans qavana (concentration).
 
Voici ce qu’écrit à cet effet un des rabbins du Maroc dans son ouvrage Séfath Émeth : “Après la destruction du Temple, nos Sages ont décidé de remplacer les sacrifices par les prières (Bérakhoth 26a ; Zohar II, 20b). Quand les juifs récitent avec ferveur et sincérité leurs prières en public, les anges s’en délectent, et un flux d’abondance (chéfa') descend directement du Ciel. Les anges ne portent pas préjudice et ne se nourrissent pas d’un flux d’abondance qui vient d’En-Haut vers le monde, car ils sont déjà “rassasiés.”
 
En revanche, lorsque les prières ne sont pas dites en public, ou avec assez d’enthousiasme et de concentration, elles sont livrées aux chiens, c’est-à-dire aux forces du mal (Tiqouné Zohar, Tiqoun 18:33b ; 21:45a). Et quand le chéfa’ vient, les anges affamés s’en emparent avec délices et ne laissent au peuple d’Israël que les restes. On a même vu des gens accomplir des mitswoth sans qu’on puisse déceler chez eux quelque changement.”
 
Tout cela dérive d’un manque d'émouna (foi) en D-ieu, sans laquelle on ne peut ni étudier la Tora, ni accomplir les mitswoth. Il est essentiel de croire en l’existence de D-ieu, d’être fermement convaincu qu’Il veille sur chacun de nous individuellement, et que tout provient de Lui, comme il est écrit : “Tout vient de Toi, et nous recevons de Ta main ce que nous T’offrons” (Chroniques I, 29:14).
 
C’est ce qui arriva aux enfants d’Israël en Égypte. Ils y ont certes observé d’importantes mitswoth, comme on l’a vu, mais ils ont dramatiquement régressé et ont failli franchir la cinquantième porte de l’impureté par manque de foi. Ils adoraient les idoles (malgré eux d’ailleurs) (Chémoth Rabah 16:2) et médisaient de leur prochain (Chémoth Rabah 1:30), péché qui équivaut aux trois transgressions les plus graves (Erkhine 15b).
 
À la sortie d’Égypte, ils furent accompagnés par des magiciens qui se servaient de noms impurs (Tan’houma, Chémoth 19 ; Rachi id. 32:4). Ils croyaient certes en l’Éternel et en Moïse Son serviteur, mais leur foi était douteuse ce qui équivaut à l’idolâtrie. Ils ignoraient totalement comment et pourquoi ils devaient observer toutes les mitswoth d'Hachem.
 
N’empêche que les rares préceptes qu’ils observèrent les préservèrent de l’extermination totale, à D-ieu ne plaise. Délivrés de l’asservissement, par des miracles et des prodiges, les enfants d’Israël finirent par reconnaître le Roi des Rois, et leur foi fut totale. Toutes les mitswoth sont donc subordonnées à une foi inébranlable en D-ieu et conduisent à la foi.
 
Si l’Éternel a ordonné aux enfants d’Israël de veiller à la sanctification du premier mois, c’est pour leur montrer qu’Il est le Roi de l’univers, qui modifie les temps et change les moments. S’Il leur a ordonné d’attacher l’agneau symbole de l’idolâtrie en Égypte de l’examiner pendant quatre jours, et de l’égorger le quatorzième jour du mois, en face des égyptiens (Pessa’him 97a ; Mekhilta Bo), c’est pour leur montrer que ce n’est qu’un animal, sans aucune trace d’intelligence ni de puissance.
 
Son sacrifice engendra l’élimination des forces du mal et la révélation de la lumière de la foi. Tous les incirconcis des enfants d’Israël se firent circoncire ; les liens entre les enfants d’Israël et l’Éternel se raffermirent par le “mélange” du sang de la circoncision et du sacrifice de Pessa’h (cf. Ezéchiel 16:6).
 
Grâce à cette foi renouvelée, ils corrigèrent pendant quarante-neuf jours, les quarante-neuf traits d’impureté dont ils s’étaient souillés. Et enfin, s’ils durent quitter l’Égypte en toute hâte, c’est essentiellement pour ne pas souiller leur vue, car, nous l’avons vu, l’Égypte était un centre d’impureté (Chémoth Rabah 1:22).
 
La question reste cependant posée: pourquoi à la sortie d’Égypte, en dépit de toutes les mitswoth – en particulier l’observance du Chabath qui équivaut à toutes les mitswoth – les enfants d’Israël ne se sont-ils pas purifiés de leur impureté et ont-ils presque atteint le cinquantième degré d’impureté ?
 
En fait, les enfants d’Israël étaient purs : D-ieu les avait pourvus d’un esprit de sainteté, et ils virent toutes les sphères célestes lors du passage de la Mer Rouge. Même les servantes et les bébés désignèrent le Saint, béni soit-Il (Sota 11b) et entonnèrent un cantique en l’honneur de l’Éternel (Chémoth Rabah 23:2), virent l’égyptien (l’ange de D-ieu) gisant au bord de la mer (id. 21:5). Ils furent vraiment sanctifiés et furent promus immédiatement au titre de “génération de la connaissance” (Vayiqra Rabah 9:1 ; Bamidbar Rabah 19:3), qui reconnut son Créateur.
 
Mais pour accéder au niveau de : “Nous ferons, puis nous écouterons”, et de se soumettre à la Tora, “ils se placèrent au bas de la montagne” (Exode 19:17), c’est-à-dire qu’ils ne reçurent pas la Tora comme cadeau, mais peinèrent pendant quarante-neuf jours supplémentaires pour se purifier de leur souillure grâce à la lumière spirituelle que D-ieu leur envoya le jour de la sortie d’Égypte.
 
L’auteur du Maguen Avraham écrit à cet effet : “La lumière radieuse, que l’Éternel fit descendre de la cinquantième porte de la Connaissance pour faire sortir d’Égypte les enfants d’Israël, disparut, car elle avait été donnée gratuitement, sans rapport avec leurs actions. Les enfants d’Israël durent par conséquent compter quarante-neuf jours pour purifier les sept attributs. Car l’homme doit emprunter le chemin de la droiture et s’élever des niveaux terrestres aux niveaux célestes.”
 
Cela ressemble à l’histoire d’un esclave du roi capturé et torturé par ses ennemis. Libéré, il se présenta devant son maître, les vêtements couverts de saleté et dégageant une odeur nauséabonde. Or le roi lui sourit, lui donna de nouveaux vêtements, du parfum, et lui montra même les trésors qu’il avait gardés pour lui. Après quoi, il lui dit : “Débarrasse-toi de tes vêtements souillés et habille-toi. Tu viendras alors prendre possession des trésors.”
 
C’est ce que fit l’Éternel aux enfants d’Israël. Ils étaient certes plongés dans l’impureté, mais comme ils revinrent à Lui, Lui entonnèrent une chira (un cantique) : Vaét’hanane”. Ils L’invoquèrent et Le supplièrent de tout cœur (remarquons la similitude des valeurs numériques de chira et vaét’hanane), Il les aida à se purifier et leur ouvrit toutes grandes les portes de la trésorerie. Ils atteignirent les quarante-neuf portes de la Connaissance et étaient prêts à recevoir la Tora.
 
Craignant cependant qu’en cessant d’accomplir des miracles en faveur des enfants d’Israël, Il provoquerait chez eux un déclin de la foi, l’Éternel leur envoya un Tsadiq, Moché Rabbénou (Moïse notre Maître) afin qu’ils se rendent compte que tout vient de Lui et que le Tsadiq ne perd jamais foi en l’Éternel, quelles que soient ses souffrances, qu’il accepte avec amour. Ainsi les enfants d’Israël auraient à coeur d’imiter Moché Rabbénou et de le consulter.
 
Le Talmud (Bava Bathra 116a) enseigne à cet effet que si on a un malade chez soi, on doit consulter un Sage. Comment les enfants d’Israël purent-ils donc croire en D-ieu et s’attacher à Lui ? Par l’intermédiaire du Tsadiq. On peut aussi concevoir que les enfants d’Israël croyaient en même temps en D-ieu et en Moïse, Son serviteur, et qu’en dépit de tous les miracles accomplis, Moïse restait l’esclave soumis du D-ieu Unique, omnipotent et omniprésent. Moïse n’avait en son cœur aucun orgueil. Faisant preuve de l’humilité la plus totale, il acceptait avec amour tout ce qui vient de D-ieu (cf. Nédarim 38a).
 
D’ailleurs, D-ieu Lui-même témoigne de sa fidélité : “C’est le plus dévoué de toute Ma maison” (Nombres 12:7). Les enfants d’Israël crurent donc en D-ieu et en Moïse Son serviteur. On peut aussi concevoir que les enfants d’Israël avaient une foi totale et inébranlable en D-ieu, Qui leur montra tant de miracles à l’occasion des dix plaies, mais qu’envers Moïse, ils restaient plus sceptiques.
 
Cependant, lors de la plaie des premiers-nés, quand ils virent Pharaon courir en pleine nuit vers Moïse et Aharon (Mekhilta, Chémoth 33 ; Rachi id. 12:31) afin de leur demander de prier en sa faveur, et les faire sortir au plus vite d’Égypte, lorsqu’ils virent avec quelle ardeur Moïse priait pour eux lors du passage de la Mer Rouge, leur foi en lui s’accrût considérablement: les enfants d’Israël comprirent que l’Éternel exauce la prière sincère des Justes. Ils crurent donc en D-ieu et aux Tsadiqim, ses esclaves fidèles.
 
On peut considérer que D-ieu partage Sa gloire et Son honneur avec le Tsadiq qui suit Ses voies et recherche l’humilité plutôt que la gloire. C’est ainsi que lorsque les enfants d’Israël furent pénétrés d’une foi immense en D-ieu, l’Éternel partagea Son honneur avec Moïse. Lorsque, conformément à la prescription divine, Moïse accomplit des miracles aux yeux de tout le peuple, la foi des enfants d’Israël se renforça considérablement. Il en est ainsi de tous les Tsadiqim, dont nous sommes fiers d’imiter les vertus, en particulier celle de s’effacer complètement devant le Saint, béni soit-Il, et de Le servir de tout son cœur.
 
Moïse continua cependant à se comporter comme le plus humble des esclaves. C’est ce que nous voyons dans l’épisode du passage de la Mer Rouge. Pourquoi les enfants d’Israël qui allaient recevoir la Tora et savaient que la route était libre, ne plongèrent-ils pas dans la mer comme Na’hchon, fils d’Aminadav ? Parce qu’ils n’en avaient pas reçu l’ordre de Moïse, qui ne voulait prendre aucune initiative sans l’approbation divine.
 
Moïse voulait ainsi leur montrer que dans toutes les circonstances de la vie, on ne doit rien faire sans le consentement de D-ieu. Le miracle était certes assuré, mais Moïse agit de la sorte pour exalter la gloire de D-ieu et montrer que lui, n’était qu’un humble esclave auprès de son Maître. Les enfants d’Israël crurent alors en l’Éternel et en Moïse Son serviteur. Grâce à leur foi, ils suivirent l’Éternel dans le désert, sur une terre inculte, avant même de recevoir la Tora.

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