La guerre des rôles

Tout comme on se bat pour obtenir le poste qu’on veut dans la vie, se livre en nous une bataille de deux clans, au son des épées et de querelles épuisantes.

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Sharon Rotter

Posté sur 05.04.21

Tout comme on se bat pour obtenir le poste qu’on veut dans la vie, se livre en nous une bataille de deux clans, au son des épées et de querelles épuisantes.

Cela fait un moment que je rêve de travailler dans cet endroit. Régulièrement, je relance le patron pour un poste, un peu gênée, mais dans un sentiment que je n’ai pas le choix. Chaque fois qu’il m’appelle, je suis convaincue que ça y est, voilà le job qui va me mettre dans le coup, puis j’en rigole lorsqu’il me demande un numéro de téléphone ou m’annonce qu’il n’a pas encore de poste qui me conviendrait. J’ai fait monter la pression en faisant appel à une tierce personne bien placée, et puis j’ai tout un arsenal de prières, mais rien ne bouge.
  
La dernière fois qu’il m’a appelée, en voyant son numéro s’afficher, j’ai eu un moment d’espoir.

« Sharon », me dit-il d’un ton direct, « tu aurais quelqu’un à me recommander pour un poste de chercheuse d’informations professionnelle ? »

Je me tus. Un peu déçue en repensant à sa question.

« A moins que tu veuilles peut-être prendre le poste ? » continua-t-il prudemment, en sachant que j’étais « surqualifiée » pour ce job.

La vérité ? C’est qu’il me faut un travail d’urgence, il faut que je fasse rentrer autant d’argent que possible et le privilège de refuser ne se profile même pas à l’horizon, même si ce n’est pas le poste rêvé. Cela rabaisse même un peu mon ego, puisque je rêvais d’occuper la place de celle pour qui on fait les recherches… Mais D.ieu en a voulu autrement, et moi qui tente avec ténacité de vivre ma vie en m’annulant devant Sa volonté, j’ai essayé d’accepter cela avec amour.

Ce n’était pas simple, je l’admets.

Mon mauvais penchant et mon ego, bien présents, étaient sans arrêt sur mon dos, ils ont fait un travail de fond et agressif. Pourquoi est-ce qu’ils ne te prennent pas, bon sang ? Tu conviens à 100% pour le poste ! Tu serais excellente, sûrement meilleure que la personne qu’ils ont choisie ! Qu’est-ce qu’elle a de plus que toi ? Des questions, sans cesse. En douceur, mais sans relâche pour faire descendre ma confiance en moi à zéro et me transformer en une personne amère et jalouse.

Mais le travail de ces dernières années : l’étude de la Torah et des enseignements de Rabbi Nah’man, ne fut pas vain, car de l’autre côté, la foi me chuchota, d’une voix douce et apaisante : « Tu sais très bien que tout est pour le bien et que D.ieu t’aime et sait ce qui est le mieux pour toi, de la façon la plus précise qui soit. S’Il a tourné les choses ainsi, fais-Lui confiance, c’est que c’est comme ça que ça doit être, et dis-Lui merci, tout le temps. Réjouis-toi, car Il t’envoie un supplément de parnassa dans des bonnes conditions qui conviennent exactement à ta situation du moment. »

Ainsi ces deux forces opposées se chamaillèrent en moi à coups d’épées, jusqu'à me donner mal à la tête. Une fois au travail, qui se révéla complètement approprié à mes compétences et même intéressant et satisfaisant, je réussis à comprendre pourquoi cette personne avait été choisie à ma place pour le poste auquel j’aspirais, et même à l’encourager.

Après une semaine de travail, quand les voix dans ma tête se calmèrent un peu et que je commençai à me sentir plus détendue et comme consolée, je reçus un autre coup de téléphone. « Une place s’est libérée, quelqu’un a démissionné, et puisque le calendrier est serré, serait-il possible que tu acceptes aussi ce poste-là ? » me dit-on avec hésitation.

J’étouffais un soupir de soulagement, enfin, on me donnait le poste tant attendu !

Le cœur heureux, je remerciai le Créateur. Même si c’était un peu par deuxième choix qu’on me le proposait… C’est sûr que ce n’est pas très flatteur. Mais je me suis à nouveau souvenue que c’est la façon dont le Créateur gère, adroitement et avec des gants de soie, ma complexité, afin de m’éviter des dommages, que je sache toujours quelle est ma place dans le monde et que je ne tombe pas dans la fierté et dans la sensation que je fais les choses par moi-même.

A ce moment, je ressentis fortement une sorte d’approbation, comme si on me faisait comprendre, d’en haut, que j’avais agi comme il fallait, que
j’avais passé l’épreuve avec succès.

Je ne vous dirai pas que j’ai réussi à annuler mon ego et mon mauvais penchant, il est à l’intérieur de moi en permanence, à l’affût du bon moment pour montrer sa sale tête. Mais il semblerait que ma bataille acharnée contre lui et ma volonté tenace de me rapprocher du Créateur, de la vérité et de la gratitude, sans compromis, ont fait leur effet en haut.

Car en fin de compte, ce qu’on nous demande, c’est de ne jamais abandonner dans cette bataille incessante face au mauvais penchant, et que l’on fasse bon usage des armes qu’on a à notre disposition : les louanges, la foi, la gratitude, afin de nous rappeler du pouvoir du bien et de vaincre la souffrance grâce à la joie.
 
 
 

 

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