La Finlande : mon Égypte

Face à toutes les épreuves auxquelles nous avons fait face, notre famille est restée unie. Tous les six, nous nous sommes convertis. Nous sommes encore ici, sans regrets.

5 Temps de lecture

Shlomo Brunell

Posté sur 06.04.21

Nos retrouvailles

En quittant l'Église – en 1990 – une nouvelle situation s'ouvrait devant moi. Je n'étais plus un membre inscrit d'une congrégation chrétienne, sans être encore un membre du peuple juif. Pour la première fois de ma vie, je vivais soudainement sans un lien formel avec une religion. Au niveau spirituel, cette période se révéla être un monde vide. Dans la mesure où la religion et la spiritualité avaient représenté une partie importante de ma vie et de ma personnalité, cette expérience fut difficile à vivre.

D'autre part, le vide spirituel dans lequel je me trouvais me permit d'entreprendre une véritable recherche qui, jusqu'alors, n'avait pas été possible. Je commençais cette exploration avec un peu d'appréhension, mais j'appréciai cette nouvelle liberté. L'odyssée dans le “no man's land” spirituel dura quelques années, jusqu'au jour où je trouvai – avec ma famille – un paradis pour le judaïsme : Eretz Israël (la Terre d'Israël). 
 
En fin de compte, ce que je trouvai en Israël ne s'avéra pas entièrement nouveau pour moi. De fait, mon ancienne religion – le christianisme – était basée sur le judaïsme, même si elle avait été changée et travestie. Je devins impatient dans cette recherche. Je ne me satisfaisais plus avec des produits de substitution ; je désirais ce qui était vrai.
 
Le rabbin de la ville d'Helsinki – Michaël Alony – fut mon guide et celui de ma famille pendant ma première conversion au judaïsme. Cette conversion orthodoxe ne fut pas une fin en elle-même ; plutôt, elle nous permit de nous amener en Israël. Ma femme et moi-même désirions ardemment venir vivre sur la terre des juifs. Nous désirions entrer en Israël en tant que juifs, et notre conversion en Helsinki rendit ceci possible. Le rêve de ces quelques années devint réalité lorsque nous quittâmes la Finlande et que nous fîmes notre aliyah en Israël en 1996.
 
Notre installation en Israël nous permit de prendre racine dans un environnement entièrement nouveau. Le lien qui nous liait à notre pays d'origine fut rompu ; nous nous replantions dans une terre qui, nous espérions, serait le témoin d'une nouvelle génération florissante de juifs.
 
La halakha (la loi juive) est très stricte dans le domaine de la conversion. Lorsque nous arrivâmes en Israël, nous apprîmes que notre première conversion à Helsinki ne serait pas reconnue ici. Dans la mesure où le rabbin qui nous avait convertis n'était pas connu ici, nous devions tout recommencer de nouveau. Ce processus nous demanda plusieurs années d'étude pour nous tous. Être testé devant un tribunal de trois rabbins n'est pas forcément une partie de plaisir, mais cela en valait la peine. Nous dûmes passer les tests à plusieurs reprises.
 
Finalement, nous furent acceptés et ma femme et moi-même nous remarièrent. Nous trouvâmes rapidement une congrégation et une communauté d'amis avec lesquels nous pûmes nous lier. Cela fut notre véritable aliyah au sein de 'Am Israël (le peuple d'Israël) : nous ne faisions désormais plus qu'un avec la nation juive.
 
La vie en Israël est incomparable à toute autre chose. Avant tout, nous vivons ici en tant que juifs et Israël est le seul endroit au monde que nous pouvons appeler le nôtre. Nous vivons dans un État juif où les fêtes nationales sont des fêtes juives. D'autre part, ceci peut également être seulement de la poudre aux yeux. En Israël, nous devons lutter et combattre pour notre existence. L'aspect positif est qu'ici, nous possédons les outils qui nous permettent de mener cette lutte.
 
Les menaces proviennent de l'intérieur d'Israël, et de l'extérieur. Chaque israélien se pose souvent des questions du type : “Où se trouvent les masques à gaz que nous devons utiliser en cas d'attaque ?” Les attentats-suicides ne sont pas rares aux stations de bus. Lorsque cela arrive, les téléphones portables sonnent sans fin : tout le monde désire savoir si ceux et celles qu'on aime sont sains et saufs. La vie en Israël signifie également des dépenses plus élevées que les revenus ; pourtant, d'une façon inexplicable, nous survivons à cette situation. C'est sans doute pour cela qu'Eretz Israël est appelée une terre de miracles.
 
Dans tous les cas, nous aimons réellement vivre en Israël : ceci est notre maison ! Le soleil est chaud, le vin est bon et chaque fois que nous en avons envie, nous pouvons aller à Jérusalem. Ma femme et moi-même ne sommes pas retournés en Finlande depuis notre arrivée en Israël, il y a sept ans déjà. Sans doute y retournerons-nous un jour pour rendre visite aux personnes que nous connaissons. Pour nous, la Finlande représente l'Égypte que nous avons quittée pour Eretz Israël.
  
En fait, ce que je raconte n'est pas seulement mon histoire. Face à toutes les épreuves auxquelles nous avons fait face, notre famille est restée unie. Tous les six, nous nous sommes convertis, deux fois. Nous sommes encore ici, et sans regrets. Pour nous tous, notre aliyah représente énormément : nous vivons maintenant sur notre terre, Eretz Israël, la Terre sainte. Je considère le livre que j'ai écrit comme mon récit personnel, une sorte de documentaire, un héritage que je désire laisser à mes enfants. Avec l'aide de D-ieu, ils le transmettront à leurs enfants.
 
Nos quatre filles ont été très impliquées dans notre aventure. Ma femme et moi-même avons choisi de les tenir au courant des différentes étapes de ce long processus. Elles étaient très jeunes lorsque nous allèrent vivre quelques temps en Australie. Dans ce pays, elles durent apprendre une nouvelle langue et s'adapter à un nouvel environnement.
 
Lorsque nous retournèrent en Finlande, elles durent commencer de nouveau à apprendre dans une nouvelle école, se faire de nouvelles amies, se familiariser de nouveau avec leur langue natale. Cependant, c'est notre installation en Israël qui fut le défi le plus difficile à relever. À l'occasion, il m'arrive de m'inquiéter à propos de tout ce que nous leur avons demandé de faire.
 
Lorsqu'une personne est jeune, elle s'adapte facilement ; la capacité d'apprendre des erreurs passées est également un aspect important de toute nouvelle installation. Je prie et j'espère que leurs premières années de vie ne furent pas trop difficiles à cause de nous. Il y eu tant de changement et de décisions difficiles à prendre ! Lorsque nous quittâmes l'Église, elles nous suivirent dans notre décision ; elles étaient encore trop jeunes pour juger la situation nouvelle. Pourtant, cela signifiait être exclues des leçons de religion, auxquelles toutes leurs amies assistaient.
 
Quelques années plus tard, lorsque nous nous sommes convertis à Helsinki, nos filles étaient assez grandes pour prendre leurs décisions d'elles-mêmes et accepter une nouvelle religion. Ce sont elles qui signèrent le document dans lequel il est écrit qu'elles sont prêtes à suivre un nouveau style de vie : une vie juive. Dans ce document, il est également écrit qu'elles sont prêtes à élever leurs futurs enfants dans la foi juive.
 
Il est écrit dans le document : “Si je suis bénie avec des garçons, je promets de les amener dans l'Alliance d'Abraham. De plus, je promets d'élever tous les enfants avec lesquels D-ieu me bénira dans le respect de la croyance juive, de ses coutumes, de la fidélité aux espoirs juifs et au style de vie juif.”
 
Ma femme Runa – qui s'appelle maintenant Ruth – a toujours été très proche de moi, dans chacun des différents aspects de mon développement religieux. Elle n'a jamais hésité à me suivre dans mes décisions qui ont changé notre façon de vivre. Elle et moi désirons voir la poursuite de notre foi en nos enfants. Je désire que mes enfants sachent l'importance que j'accorde au privilège d'avoir obtenu notre “carte d'adhésion” au sein de la famille d'Israël. Cela a été acquis en payant un prix élevé, mais il s'agit d'un privilège et non d'un sacrifice. Je prie pour que nous puissions vivre une vie qui fasse honneur à notre nouvelle association.
 
 
(“Strangers No More, par Shlomo Brunell. Traduit et reproduit avec l'autorisation des éditions Gefen House 2005 www.gefenpublishing.com).

Ecrivez-nous ce que vous pensez!

Merci pour votre réponse!

Le commentaire sera publié après approbation

Ajouter un commentaire

Contenu sur le sujet