Étudier le Liqouté Moharan

L'étude du Liqouté Moharan n'est pas seulement un exercice intellectuel. Plutôt, il s'agit d'un moyen pour opérer une transformation spirituelle

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le rabbin David Sears

Posté sur 06.04.21

Extrait du livre “The tree that stands beyond space : Rebbe Nachman on the mystical experience” publié aux “Éditions de l'Institut breslev de recherche.”

Rabbi Na'hman de Breslev a indiqué d'une façon claire que ses leçons sont destinées non seulement aux personnes dont les accomplissements spirituels ont atteint des sommets, mais également pour toutes les autres personnes.

Ainsi, même si une personne mène une bataille féroce contre le mauvais penchant – et qu'elle pense avoir perdu la guerre depuis longtemps – celle-ci doit savoir que Rabbi Na'hman s'adresse également à elle. Sachant cela, de quelle façon la personne qui est loin d'être un Tsadiq, la personne qui est d'un niveau et d'un comportement ordinaires, peut-elle se sentir concernée par les leçons extrêmement élevées de Rabbi Na'hman. Également, comment peut-on appliquer ces enseignements dans notre vie quotidienne ? En d'autres termes, de quelle façon la 'hassidouth breslev fonctionne-t-elle ?

Plusieurs tentatives ont été faites pour essayer de présenter une vue d'ensemble de l'approche breslev en décrivant cette approche selon une idée générale et un ensemble de pratiques spirituelles spécifiques. L'objectif de ces tentatives est identique à toutes : simplifier une littérature qui – à priori – peut sembler extrêmement ésotérique.

Le premier de ces essais fut celui du rabbin Yits'haq Breiter et de son ouvrage “Seder HaYom” (traduit en français par la rédaction de Breslev Israël et dont la lecture est possible en cliquant ici). Écrit en Pologne avant l'holocauste, cet ouvrage reste encore de nos jours une pièce incontournable. Plus récemment, le rabbin 'Haïm Kramer a écrit “Le pont très étroit”. Le rabbin Kramer a utilisé l'ouvrage du rabbin Breiter en développant les différents concepts qui y sont abordés. Ces ouvrages ont influencé fortement un nombre important de personnes et leur ont permis de découvrir la 'hassidouth breslev.

Cependant, ni le rabbin Breiter, ni le rabbin Kremer ne voudraient limiter le chemin merveilleux et unique de Rabbi Na'hman à un inventaire de croyances et de pratiques, même si elles sont présentées d'une façon talentueuse. Avec tous les avantages que la lecture de ces ouvrages permet, ils n'en restent pas moins des livres d'introduction dont l'objectif ne fut jamais d'éclipser le cœur de l'enseignement de Rabbi Na'hman : le Liqouté Moharan. Étudier, mettre en pratique et apprendre à percevoir le monde à travers l'enseignement du Liqouté Moharan reste le fonctionnement ultime de la 'hassidouth breslev.

Le Liqouté Moharan : c'est quoi ?

Il n'existe pas une façon polie, diplomatique pour le dire : le Liqouté Moharan est tout simplement incomparable aux autres textes de la littérature de la 'hassidouth et même de la littérature générale. Il ne s'agit ni d'un manuel ou d'un commentaire. Plutôt, il s'agit d'un ouvrage révélateur unique. Les discours publiés dans le Liqouté Moharan contiennent les perceptions de Rabbi Na'hman de l'essence de la réalité.

Ces discours – ou leçons – ont été revêtus d'une sagesse d'un niveau inférieur et sont présentés d'une façon qui permet aux élèves qui le désirent vraiment d'en comprendre leur aspect principal. De cette façon, chaque personne peut atteindre le cœur de l'enseignement de Rabbi Na'hman, selon sa capacité et son niveau spirituels.

Cela permet à chaque leçon d'être un véritable chemin – taillé sur-mesure – pour chaque personne qui l'étudie, à chaque instant et d'une façon qu'il est impossible de commencer à réaliser à sa juste valeur.

Le prérequis principale afin d'étudier le Liqouté Moharan est que l'étudiant-e doit désirer mettre de côté ses préconceptions et croire en la vérité et en la sainteté du chemin de l'enseignant : Rabbi Na'hman de Breslev.

De nouveau, la question revient : “De quelle façon puis-je faire cela ?”

Lorsque Rabbi Na'hman décéda – dans la ville ukrainienne d'Ouman – il était agé de trente-huit ans. De quelle façon un enseignant qui n'est plus de ce monde peut-il encore exercer une influence dans notre vie ?

En fait, cette question – et sa réponse – ne sont pas uniques à la 'hassidouth breslev. Les Sages du Talmud nous apprennent qu'en étudiant l'enseignement d'un Tsadiq, “ses lèvres murmurent dans la tombe.” Étudier l'œuvre d'un Tsadiq – n'importe quel Tsadiq – nous permet d'établir un lien spirituel avec lui et de transcender les limites de ce monde.

Les Sages du Talmud ont également dit que “les Tsadiqim sont même plus grands après leur mort que de leur vivant.” Dans la même veine, il est écrit dans le Zohar : “les Tsadiqim qui sont morts sont présents dans ce monde d'une façon encore plus grande que s'ils étaient vivants.”

Cela signifie que grâce à ses leçons, Rabbi Na'hman peut encore enseigner des choses fabuleuses aux personnes qui vivent dans notre génération. Ainsi, la situation est la même qu'à l'époque où Rabbi Na'hman vivait dans les villages ukrainiens. Si nous abordons son enseignement d'une façon adéquate, ses discours de Tora deviennent un véritable “merkava”, un véhicule spirituel qui nous élève de la poussière de ce monde ; ce merkava possède le pouvoir de nous initier à une expérience que les mots ne peuvent pas décrire : la perception lucide d'un type de dévotion que Rabbi Na'hman désire partager avec nous.

De quelle façon étudie-t-on le Liqouté Moharan ?

Nous devons admettre qu'un nombre important des leçons de Rabbi Na'hman sont manifestement opaques. Si l'on désire simplement commencer à comprendre les idées qui y sont exposées, il est important de savoir ce qui est écrit dans les sections pertinentes du Liqouté Halakhoth de Rabbi Nathan de Breslev. Les commentaires majeurs de la littérature breslev sont également primordiaux : Parpara'oth le'Hokhma, le Biour HaLiqoutim… Tous ces ouvrages permettent à l'étudiant-e d'obtenir une vision plus claire du texte du Liqouté Moharan.

D'autre part, il est important d'étudier plusieurs fois le même discours, encore et encore… Cela permet d'acquérir une meilleure compréhension de ses différentes facettes, de se familiariser avec ses nuances et d'entendre sa “musique.” Selon Rabbi Na'hman, chaque personne doit choisir un discours spécifique du Liqouté Moharan et “vivre à travers lui” pendant une période de plusieurs mois. Lorsque la personne pense avoir atteint une compréhension adéquate de ce discours, elle peut passer à l'étude d'un autre.

En même temps, nous devons mettre en pratique les sujets abordés dans chaque leçon si l'on désire comprendre réellement leur signification. Par exemple : dans la leçon 4 du Liqouté Moharan vol. 2, Rabbi Na'hman aborde les sujets suivants : briser notre cruauté et notre égoïsme innés et donner la tsédaqa (la charité). En donnant vraiment la tsédaqa de la façon dont Rabbi Na'hman le conseille, nous devenons fortement liés-es aux paroles du Rabbi. De la sorte, nous créons les récipients spirituels qui nous permettent de recevoir des niveaux encore plus profonds de compréhension de la leçon du  Rabbi.

Un autre principe de la tradition orale breslev et que chaque discours contient les ségouloth nécessaires – les propriétés spirituelles intrinsèques – afin de transmettre les perceptions élevées dont nous faisions mention précédemment. Selon ce principe, l'étudiant-e doit être attentif-ve à ce qui est dit dans le discours – ainsi qu'à ce qui n'y est pas dit – et à faire extrêmement attention aux conseils pratiques qui sont décrits. Chaque facette du discours est façonnée afin d'accomplir à la perfection cet objectif.

Cette approche reflète les paroles de Rabbi Na'hman : “Mes (leçons de) Tora sont entièrement faites d'haqdamoth (d'introductions et de préfaces).” Chaque chose est liée à toutes les autres et le tout représente un ensemble parfaitement intégré. Il s'ensuit que chaque partie du discours doit être comprise, d'une façon ultime, selon la totalité de la leçon et que chaque instruction doit être suivie afin d'atteindre le but final.

Vivre selon l'enseignement

Nous comprenons de cela que l'étude du Liqouté Moharan n'est pas seulement un exercice intellectuel. Plutôt, il s'agit d'un moyen pour opérer une transformation spirituelle. De plus, grâce à une étude tirée du texte et de la mise en pratique des conseils dictés, nous commençons à percevoir le monde qui nous entoure d'une façon différente.

Nous commençons à vivre avec la Hachga'ha Pratith (la Providence divine), en nous servant d'un discours spécifique du Liqouté Moharan comme des lunettes qui nous permettent de percevoir les messages cachés que D-ieu nous envoie constamment. Cela provoque souvent des changements importants dans notre vie.

Par conséquent, il est très utile de coucher sur le papier toutes les “coïncidences significatives” dont nous sommes les témoins et de réfléchir à la façon dont elles appartiennent au discours que nous sommes en train d'étudier. Cette “synchronicité” peut nous aider d'une façon insoupçonnée et puissante à analyser le monde dans lequel nous vivons comme le véritable commentaire d'un discours, plutôt que l'inverse.

Un aspect supplémentaire de l'étude du Liqouté Moharan consiste à pratiquer hitbodédouth, la méditation-prière spontanée faite dans notre langue maternelle, de préférence la nuit et dans un environnement calme et naturel. Cette heure quotidienne doit être réservée à réfléchir sur le discours que nous étudions. Nous devons analyser la façon dont il s'applique à notre vie, notre personnalité… Il est important d'analyser les évènements que nous avons vécus la veille selon ce discours et de prier pour que D-ieu nous accorde la lumière de la compréhension et les conseils qui nous sont nécessaires.

Devenir doué-e dans ce processus est sans aucun doute l'aspect principal d'une relation authentique entre un-e élève et son enseignant. Sur une période de presque vingt années, j'ai été le témoin direct de la façon dont mon enseignant personnel – le Rav Elazar Mordekaï Kenig, chelita de la ville de Tzfat en Israël – représente l'exemple parfait de la personne qui vit selon les leçons du Liqouté Moharan.

Peu importe ce qui arrive au Rav Kenig, cela reflète la leçon dans laquelle il est plongé. Les 'hidouchim (idées originales) qu'il développe bondissent de ses propres leçons et les “coïncidences significatives” qu'il est possible d'observer en sa présence sont tout simplement stupéfiantes. J'ai personnellement entendu d'autres 'hassidim breslev parle de la sorte de leurs enseignants personnels.

Rabbi Nathan de Breslev a écrit à plusieurs reprises – et avec une grande force – qu'il ne suffit d'étudier les textes et de les interpréter selon notre compréhension. Nous devons également chercher des talmidim (élèves) plus avancés que nous ; ces élèves doivent être solidement ancrés dans la tradition breslev et dans ce cas, ils peuvent nous servir de conseillers spirituels. Cependant, trouver un enseignant qualifié avec lequel il est possible de développer une relation personnelle peut s'avérer extrêmement difficile, particulièrement si vous n'habitez pas en Israël et près d'une communauté breslev.

Cependant, cette difficulté ne doit pas représenter un obstacle insurmontable pour une personne qui désire entreprendre l'étude du Liqouté Mohran. Il est écrit dans la Michna : “Désigne-toi un enseignant et acquiert un camarade…” Même si nous sommes encore en train de chercher un enseignant, nous pouvons au moins trouver un partenaire d'étude. Cela nous laisse tout le temps pour prier afin d'avoir le privilège de trouver l'enseignant adéquat.

Si trouver un partenaire d'étude est également difficile, nous devons en faire une raison supplémentaire pour mettre en pratique hitbodédouth ! “Quiconque désire suivre le chemin spirituel doit se souvenir d'une chose importante” a dit Rabbi Na'hman, “Cette personne doit s'encourager ; elle doit servir D-ieu de son mieux. Cela lui permettra d'être assurée qu'un jour ou l'autre – après de nombreux jours ou de nombreuses années – elle recevra l'aide de D-ieu et que les portes de la sainteté s'ouvriront pour elle.”

Si nous sommes résolus-es, nous rencontrerons le succès. Peu importe la nature de nos échecs précédents, D-ieu désire réellement qu'“en fin de compte, tout se transforme en quelque chose de bon.” 

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