Qui fait mériter le peuple? Bealoteha

Aharon a donc rectifié Hod, et Moché a rectifié Netsa'h. Et si tous les deux étaient entrés en terre d'Israël, le Saint Temple n'aurait jamais été détruit, selon le Lev Sim'hah...

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le Rav David Hanania Pinto

Posté sur 08.06.22

Le Ramban demande pourquoi D-ieu a réconforté Aharon en lui proposant l’allumage et l’entretien des lampes du chandelier dans le sanctuaire. Il aurait pu lui proposer l’offrande de l’encens, matin et soir, dont le verset dit: …qu’ils présentent l’encens devant Ta face (Deutéronome 33:10), ou bien la min’hath ‘havitin. Pourquoi ne l’a-t-il pas consolé de la permission exclusive d’entrer dans le Saint des saints ? Aharon offrait de nombreux sacrifices (lors de l’inauguration du Michkan). Ces sacrifices étaient certes obligatoires, et si Aharon aspirait vraiment à des sacrifices volontaires, le Saint, béni soit-Il, l’a pourtant consolé en lui proposant l’allumage et l’entretien des lampes du chandelier qui sont un service obligatoire et par cela Il a réussit à le consoler. Quelle est donc la profondeur de cela ?

On peut dire en somme que si Aharon, l’élu de D-ieu, s’est senti frustré, c’est comme s’il se posait des questions sur les décisions de Dieu: l’Eternel a décrété que la tribu de Lévi ne doit pas offrir des sacrifices, et Aharon doit obéir et se conformer à Sa volonté! Une autre question se pose, dont nous avons proposé une réponse plus haut. Il est écrit: Et Aharon fit aussi… (Nombres 8:3). Le Sifri (8:5) rapporte à cet effet l’enseignement de nos Sages, selon lequel Aharon fut loué pour sa servitude! Peut-on concevoir autrement, qu’il change quoi que ce soit de la parole de D-ieu?

Le Ari écrit dans son Séfer HaKavanoth: Il est interdit de modifier la version de sa prière. Car il y a douze Portes de la prière, correspondant aux douze tribus… Celui qui prie dans une version déterminée doit continué à le faire, parce qu’il descend peut-être d’une tribu qui avait une telle version de la prière. Et s’il change, sa prière ne montera pas…

Nous savons que de nos jours les prières remplacent les sacrifices (Bérakhoth 26b; Bamidbar Rabah 18:17), comme il est écrit: Nous voulons remplacer ces taureaux par nos lèvres (Osée 14:3). Mais au temps du Saint Temple, on offrait littéralement des sacrifices et chacun des Princes des tribus offrait son korban. Ce sacrifice illuminait le Portail individuel de chaque tribu et de ses membres, d’où leurs prières s’élevaient. Si Aharon s’est senti quelque peu frustré, c’est parce qu’il voulait que l’offrande du sacrifice illumine son Portail, pour que sa prière s’en élève. Sa frustration ne venait que de son aspiration à se rapprocher de Dieu. Il entrait certes dans le Saint des Saints le jour de Kipour, il offrait l’encens, etc., mais c’est ce sacrifice qui lui était précieux car il désirait que la prière de sa tribu monte par ce Portail et perce les Cieux.

Le Saint, béni soit-Il, consola alors Aharon et lui dit: C’est ton allumage des lampes du chandelier qui éclaire les Portails de toutes les tribus d’Israël. C’est cela qui fait descendre l’abondance céleste au monde entier; c’est grâce à ton allumage que les prières de toutes les tribus et de leurs princes s’élèvent jusqu’à Moi. Il ressemblait en quelque sorte à l’honorable personne qui détient les clés de la synagogue et que tout le monde attend…

Commentant la locution vis-à-vis de la face du candélabre (Nombres 8:2), le Sforno explique que les lampes du côté droit et du côté gauche doivent tendre vers le bras central: elles exalteront alors à l’union le Nom Saint de l’Eternel et feront descendre l’abondance céleste à toute la communauté d’Israël; elles réuniront ceux de la droite, c’est-à-dire ceux qui sont préoccupés par la vie éternelle, à ceux de la gauche, qui ne veillent qu’à l’heure présente, aspect de: Elle porte la longévité en sa droite et en sa gauche la richesse et l’honneur (Proverbes 3:16). Nos Sages enseignent à cet effet: Les mondes inférieurs ne peuvent subsister que grâce aux mondes supérieurs (‘Houlin 92a). Tout le monde se conformera alors à la Volonté Divine.

Le Pitou’hé Hotam explique que c’est grâce à l’allumage des bougies par Aharon, que s’ouvrent les Portes de la prière et celles de l’abondance céleste qui descend dans le monde. Cet allumage contribue à exalter la Providence Divine grâce à laquelle s’ouvrent ces Portes. C’était là, la consolation d’Aharon.

Comme nous l’avons vu à plusieurs reprises, la lumière c’est la Torah. La tribu de Lévi éclaire les yeux d’Israël, en lui enseignant la Torah. Ce sont ses membres qui créent le lien entre les enfants d’Israël et leur père qui est aux Cieux. Et c’est pour cela que Moché les a béni: Yorou, Ils enseignent Tes lois à Ya’akov, et Ta Torah à Israël (Deutéronome 33:10). Yorou suggère héarah: l’allumage des lampes par Aharon qui éclaire la communauté d’Israël dans son étude de la Torah et ses jugements. Le Sforno écrit à cet effet sur ce verset: Comme c’est une tribu intègre, le Saint, béni soit-Il, loue ses membres pour la perspicacité et la grâce qui leur permettent d’enseigner Tes lois, comme il est écrit: Si le Rav ressemble à un ange de HaChem, on doit le consulter, demander la Torah de sa bouche (Mo’ed Katan 17a). C’est l’interprétation de nos Sages du verset: Les lèvres du pontife conservent la connaissance et qui fait allusion à Aharon. Remarquons à cet effet que les premières lettres du verset: Daber El Aharon Véamarta totalisent 12, ce qui signifie que grâce à cette parole faite à Aharon précisément d’allumer les lampes, les douze tribus d’Israël seront bénies d’abondance céleste.

Dans la terminologie de la Kabalah, l’attribut de Aharon est la séfirah de Hod. Or dans son livre Likouté Té’Amim, le Ari explique que les forces du mal n’ont aucune emprise sur la séfirah de Netsa’h, contrairement à la Séfirah de HOD, qui peut former aussi les lettres DaVaH. Le Saint, béni soit-Il, a donc ordonné à Aharon d’allumer, léha’aloth les lampes pour permettre l’élévation continue de la séfirah de Hod afin que les forces du mal n’y aient pas prise et qu’il transmette cette vertu aux générations qui le suivent… Nous savons que du temps de Moché et Aharon, les séfiroth étaient complètes, mais à cause du péché, elles ont connu une défaillance. En revanche, comme la séfirah de Moché, Netsa’h (éternité, victoire) est toujours en haut, il n’est pas nécessaire de l’élever. Il est d’ailleurs écrit à cet effet: Netsa’h, l’Eternel, protecteur d’Israël, n’est pas mensonge… (Samuel I, 15:29). Elle ne tombe donc jamais chez les forces du mal.
Nous pouvons ainsi mieux comprendre la signification du verset: Et maintenant, rapproche de toi ton frère Aharon et nomme-le Grand Pontife. Moché en fut déconfit. Le Saint, béni soit-Il, lui dit alors: J’aurai pu lui faire porter ce titre sans ton autorisation. Je demande toutefois que tu sois plus grand que lui (Chémoth Rabah 37:4). Dans son livre Péné David, Rabbi ‘Haïm Yossef David Azoulay demande: Nous savons que cet homme Moïse était fort humble, plus qu’aucun homme qui fût sur la terre (Exode 12:3). Pourquoi alors s’est-il senti frustré par la nomination de son frère?

C’est que Moché savait que c’était essentiellement grâce à Aharon et ses fils que la Providence Divine était exaltée. Il ne s’est pas senti jaloux de lui, à Dieu ne plaise: il voulait que lui aussi contribue à l’élévation de la Chékhinah. Le Saint, béni soit-Il, lui dit alors: Comme la séfirah d’Aharon est Hod, contrairement à toi, il a besoin de se rapprocher davantage [de Moi] pour que les forces du mal n’aient pas d’emprise sur lui… Je t’ai donné Ma Torah, qui est Nits’hith (éternelle)… Car si, à Dieu ne plaise, les forces du mal avaient prise sur Netsa’h aussi, le monde serait détruit.

Aharon fut loué pour son obéissance, écrit à cet effet le Ramban, parce qu’en dépit du fait que la mitsvah pouvait être accomplie par ses fils, Aharon s’est hâté d’accomplir ce précepte important pour éloigner les forces du mal de la séfirah de Hod. On peut dire que la Torah a été donnée à Moché et Aharon, dont les séfiroth sont respectivement Nétsa’h et Hod, qui sont jumelles.
Aharon a donc rectifié Hod, et Moché a rectifié Netsa’h. Et si tous les deux étaient entrés en terre d’Israël, le Saint Temple n’aurait jamais été détruit, selon le Lev Sim’hah, l’Admour de Gour, qui rapporte le Maharcha. Les enfants d’Israël n’auraient pas été exilés, car tout aurait déjà été rectifié.

On sait que lorsque le Saint, béni soit-Il, a créé la Torah, Il en a créé également la lumière qui est l’essentiel, les lettres ne constituant que des signes. Les lettres sont le feu de la Torah qui protège de tout feu étranger. Le Talmud (Avodah Zarah 18a) raconte à cet effet l’épisode de Rabbi ‘Hanania ben Téradion: Condamné à mort par les Romains, on l’attacha à un Rouleau de la Torah. On plaça sur son corps des branches et des chiffons de laine et on alluma le feu. Rabbi, que vois-tu? lui ont demandé ses disciples. Le Rouleau de Torah se consume, mais les lettres volent dans l’air leur répondit-il. Le feu n’atteignait pas les lettres, parce qu’en elles-mêmes, c’était la lumière, celle de la Torah… Ainsi, quand on accomplit une mitsvah, on créé un réceptacle, une lampe destinée à contenir la lumière et sans réceptacle la lumière ne peut être contenue. Les Sages de la Michnah s’exclament à cet effet: Malheur aux créatures de la honte qu’éprouve la Torah (Pirké Avoth 2:6). Car si on n’accomplit pas les mitsvoth, la Torah, c’est-à-dire la lumière, n’a pas où s’introduire. En allumant les lampes du candélabre et en veillant à son entretien, Aharon a créé pour les enfants d’Israël un réceptacle destiné à contenir la Torah sainte.

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