Le croyant qui n’y croyait pas – Noa’h
Admettons que je croie que la vie est une compétition permanente et qu’il faille travailler comme un forcené pour réussir, au détriment du Chabath et…
Dans l’enseignement n°7 du Liqouté Moharan, Rabbi Na’hman de Breslev enseigne que la raison essentielle de l’exil est le manque de foi, émouna en hébreu. Outre l’exil collectif du peuple d’Israël, à cause duquel nous ne sommes pas encore tous rassemblés en Terre sainte et à cause duquel le temple n’est pas encore reconstruit, il existe un autre exil : l’exil individuel. Cet exil est ressenti par chacun d’entre nous à travers les difficultés spirituelles et matérielles et les souffrances de la vie. Quand un juif n’arrive pas à se rapprocher de la Tora, ou pire s’il n’en a même pas envie, il est en exil c'est-à-dire loin de D-ieu. Quand les problèmes rendent la vie d’un juif amère, il est aussi en exil. La cause essentielle de telles situations, nous dit Rabbi Na’hman, est le manque d'émouna.
Par conséquent on peut déduire que la délivrance collective et la délivrance individuelle, en d’autres termes la joie de vivre avec D-ieu, dépendent de la réparation de l'émouna. D’ailleurs le Talmud relate que les sages d’Israël, cherchant une phrase ayant la capacité de synthétiser toute la Tora, se mirent d’accord sur un verset du prophète ‘Habakouq qui disait : “Le juste vivra par sa foi.”
Afin de mieux comprendre la force dégagée par l'émouna, nous allons étudier un verset apparemment anodin de notre paracha : “Noa’h (Noé) rentra avec ses enfants, sa femme et les femmes de ses enfants dans l’arche, à cause des eaux du déluge” (Béréchith 7:7). La partie soulignée de ce verset est apparemment inutile. En effet, il aurait suffi de dire que Noa’h et sa famille rentrèrent dans l’arche, le fait que ce soit à cause des eaux du déluge étant une évidence compte tenu des versets précédents. Cette partie “en trop” du verset appelle à un commentaire que Rachi ne manque pas de faire et qui est le suivant : “Même Noa’h avait une petite émouna, il croyait et ne croyait pas que le déluge s’abattrait. Il ne rentra dans l’arche que lorsque les eaux l’y forcèrent.”
En d’autres termes, Rachi nous dit que malgré la promesse divine du déluge, Noa’h n’y croyait pas vraiment. C’est seulement lorsque les eaux ne lui en laissèrent plus le choix qu’il rentra dans l’arche. Par conséquent il avait une petite émouna. Le problème de cette explication est qu’elle est en contradiction avec le premier verset de notre paracha qui affirme que “Noa’h était un juste” ; or nous savons que “le juste vivra par sa foi” ; comment dire alors de Noa’h qu’il avait une petite foi ?
La réponse à cette question nous est donnée par un élève du Ba'al Chem Tov, Rabbi Yé’hiel Mikhal de Zlotshov. Rachi ne dit pas que Noa’h avait une petite foi mais, qu’il rapetissait sa foi. Il s’agit des mêmes lettres en hébreu, seul le placement des voyelles crée la différence de sens. Donc il croyait que le déluge viendrait car il avait la foi et en même temps il n’y croyait pas, c'est-à-dire qu’il s’empêchait d’y croire car il savait qu’avoir foi en une chose provoque sa réalisation. Nous comprenons alors quelle est la force de la foi : elle est créatrice.
Le sens de cette parabole est que celui qui veut rembourser ses dettes, c'est-à-dire faire téchouva (se repentir), ne doit pas oublier de propager la bonne parole autour de lui afin que les autres remboursent aussi. Il se rendra ainsi beaucoup plus utile que s’il s’était concentré uniquement sur sa petite téchouva individuelle. Rabbi Nathan indique par ailleurs que celui qui désire partager avec autrui ce qu’il a appris, manifeste ainsi la preuve de la sincérité de sa démarche.
Sefer HaMidoth – Le rêve
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