Voir avec des lunettes d’émouna – Chéla’h

L’homme, même le plus intègre, peut tomber dans les filets du mauvais penchant s’il se détache, ne serait-ce qu’un instant, de D-ieu. Il peut même en arriver à ne pas voir la vérité.

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le Rav David Hanania Pinto

Posté sur 06.04.21

 Voici quelques questions que nous pouvons poser à la lecture de la Sidra de cette semaine :

1) Pourquoi Moïse a-t-il envoyé des hommes pour explorer le pays ? Nous savons que le Saint, béni soit-Il, avait d’ores et déjà promis aux enfants d’Israël qu’il trouverait grâce à leurs yeux, comme il est écrit : “Et J’ai résolu de vous faire monter du servage de l’Égypte… à une contrée ruisselante de lait et de miel” (Exode 3:17). De plus, en les faisant sortir d’Égypte, D-ieu visait essentiellement à tenir la promesse qu’Il avait faite à Avraham : “Et Je donnerai à toi et à ta postérité la terre, ta résidence, toute la terre de Cana’an, en patrimoine éternel…” (Genèse 17:8).
 
2) Pourquoi les explorateurs ont dit du mal de la Terre d’Israël et n’ont pas appris la leçon de ce qui est arrivé à Miriam qui avait parlé contre son frère Moché ?
 
3) Comment se fait-il que les enfants d’Israël aient admis la médisance des explorateurs à propos d'Eretz Israël ? N’avaient-ils pas assisté à tous les miracles accomplis pour eux par le Saint, béni soit-Il : en Égypte, à la traversée de la Mer Rouge, à la manne céleste, etc.? Ils avaient entendu la voix de D-ieu ordonner : “Tu n’auras point d’autre dieu que moi” (Exode 20:3). Dans le désert, la nuée de gloire les protégeait du froid, de la chaleur et des bêtes sauvages du désert. Ils avaient vu le Seigneur face à face, la Providence Divine dans le sanctuaire.
 
Comment ont-ils osé douter de l’unité et de l’existence du Dieu-Vérité (Chabath 55a) ; comment ont-ils pu remplacer la Vérité – aspect de la Tora et des Tsadiqim (Yérouchalmi Roch Hachana 3:8) – par leur aspiration à nommer un roi idolâtre qui les aiderait à revenir en Égypte (Rachi, Nombres 14:4) ? Ne savaient-ils pas que l’idolâtrie est dénuée de tout fondement ? “Leurs idoles ont une bouche et ne parlent point, des yeux et elles ne voient pas” (Psaumes 115:5).
 
4) Comment se fait-il que peu de temps seulement après le péché du veau d’or, qui avait failli mettre fin à l’existence du Peuple d’Israël – à D-ieu ne plaise – et qui n’a été sauvé que grâce au dévouement exemplaire et aux prières persistantes de Moché (Exode 32:14), les enfants d’Israël ont eu l’insolence de parler du mal d’Eretz Israël.
 
La sainteté de cette terre ne dépasse-t-elle pas celle de toutes les autres terres (Kélim 1:6 ; Bamidbar Rabah 7:8) ? Comment ont-ils pu concevoir une fois de plus l’idée de l’idolâtrie et de renier D-ieu, alors qu’ils percevaient quotidiennement l’existence et la sainteté du Tout-Puissant dans le désert ?
 
Vivre avec D-ieu
 
Quel est le verset dont dépend toute la Tora ? “Dans toutes tes voies, connais-Le et Il aplanira ta route” (Proverbes 3:6) même dans le domaine du péché, précise Rabba (Bérakhoth 63a). En d’autres termes, dans tout ce qu’on fait dans le domaine matériel, et à plus forte raison dans le domaine spirituel, il convient de connaître, se rappeler D-ieu et ressentir Son existence.
 
Le Maharcha (ibid.) fait remarquer à cet effet que le verset ne dit pas “souviens-toi de Lui”, mais “connais-Le”. Cela signifie qu'il fait allusion à la connaissance vraie de Son existence, qu’Il est l’Être Suprême, capable de connaître toutes les voies de l’homme, et qui récompensera les Justes et punira les méchants.
 
Celui qui se sépare ne serait-ce un moment du Saint, béni soit-Il, et ne pense qu’à son plaisir, est susceptible d’en arriver à renier l’existence de D-ieu. Son mérite personnel ne lui servira alors à rien, même s’il est un grand Tsadiq ou s’il descend d’une famille de justes illustres. C’est parce qu’à l’instant où il a séparé sa pensée du Saint, béni soit-Il, il s’est séparé de la vérité (qui est le sceau de D-ieu) (Chabath 55a).
 
Le mauvais penchant introduit alors dans son esprit de mauvais traits, tels que la jalousie, l’orgueil, etc. La vérité est toujours là, devant ses yeux, mais il ne la discerne pas : ses yeux se sont fermés par suite de sa séparation avec son Créateur.
 
Ainsi, quand on se prépare à accomplir une mitswa, il convient de se concentrer totalement sur le Saint, béni soit-Il, sans penser à la moindre satisfaction personnelle, car ce n’est pas pour la satisfaction que les mitswoth ont été données (‘Irouvin 31a).
 
Moché a envoyé les explorateurs en mission pour aiguiser leur foi. Car si au départ ils avaient pris pleinement conscience de la mitswa – et s’y étaient attachés fermement – leur foi en Dieu se serait intensifiée, en se rappelant que le Tout-Puissant a libéré son peuple de Pharaon et de ses esclaves. S’ils avaient pris aussi conscience du fait qu’Il allait aussi sûrement les sauver des géants, ils auraient compris que rien de mal ne peut arriver à celui qu’on charge d’une mitswa (Pessa’him 8b ; Zohar 13:273a).
 
À preuve, les géants les avaient bien discernés, comme il est écrit : “nous étions à leurs yeux…” (Nombres 13:33), mais par miracle ils ne les ont pas lésés (cf. Sota 35a ; Rachi, Nombres 13:32), car D-ieu avait fait en sorte que les habitants du pays de Cana’an soient occupés à enterrer leurs morts et ne remarquent pas la présence des explorateurs parmi eux.
 
Ces miracles auraient dû les raffermir et les inciter à entraîner tout le peuple d’Israël avec eux et leur faire partager leur enthousiasme. Ils les auraient incités à rester intègres comme au départ, s’ils avaient continué à s’attacher à la mitswa qu’il leur incombait d’accomplir et au Saint, béni soit-Il. Mais au lieu d’explorer le pays, de porter constamment à l’esprit cette mitswa et d’intensifier leur foi, les explorateurs ont commencé à faire du tourisme, à prendre des vacances, à se détendre, à jouir de la beauté du pays et à exploiter tout le bien qui s’y trouvait.
 
Ils se sont aussi complètement détachés de leur mission, qui consistait à ressentir la sainteté d’Eretz Israël et du Tout-Puissant. Au lieu de craindre l’Éternel, ils ont alors été effrayés par les géants. Au lieu de comprendre que D-ieu tuait tous les jours de nombreux géants pour la réussite de leur mission, les explorateurs ont accusé la Terre de dévorer ses habitants, ceux qui étaient destinés à venir la peupler.
 
Des miracles à observer
 
Le Midrach (Bamidbar Rabah, 16:9) enseigne à cet effet que le miracle même que le Saint, béni soit-Il, a accompli en leur faveur, leur a servi à parler du mal de la Terre d’Israël. C’est à cause de leur recherche de plaisirs personnels et de leur séparation totale de D-ieu qu’ils se sont efforcés de semer la panique au sein du peuple. Bien que D-ieu les eût protégés tout au long de leur mission, la sainteté dont ils étaient imprégnés à leur départ avait fait place à un effroi total. Ils ont donc péché et fait pécher les autres.
 
Au lieu d’exprimer leur gratitude à D-ieu qui a continué à accomplir des miracles en leur faveur, les explorateurs ont fini par Le renier ainsi que Sa Tora, en proposant aux enfants d’Israël de revenir en Égypte pour y adorer des idoles. Comme ils ont renié ce qui a été donné en quarante jours (Ména’hoth 99b), ils ont été punis en conséquence, comme il est écrit : “selon le nombre de jours que vous avez exploré le pays, autant de jours autant d’années… quarante années” (Nombres 14:34).
 
Nous voyons ici comment l’homme, même le plus intègre, peut tomber dans les filets du mauvais penchant s’il se détache, ne serait-ce qu’un instant, de D-ieu. Il peut même en arriver à ne pas voir la vérité, comme il est écrit : “Ils ne savent pas ! Ils ne comprennent pas ! Non, leur œil est trop obtus pour voir, leur cœur pour comprendre (Isaïe 44:18).
 
Quand les enfants d’Israël ont commis le péché du veau d’or, D-ieu a accepté de retarder leur châtiment. “Mais le jour où J’aurai à sévir, Je leur demanderai compte de ce péché” (Exode 32:34), et nos Sages enseignent à cet effet qu’il n’y a pas de génération qui ne subisse les effets du châtiment engendré par ce péché (Sanhédrin 102a ; Rachi, loc.cit.). De fait, à cause du péché des explorateurs, les enfants d’Israël ont dû errer quarante ans dans le désert, et l’entrée d’Eretz Israël a été interdite à toute la génération, comme il est écrit : “eux tous qui M’ont outragé, ils ne la verront point” (Nombres 14:23).
 
L’Éternel ne leur a laissé aucune chance. Il n’a pas réparti leur punition le long des générations. Il convient donc d’éviter par tous les moyens ce venin de la médisance, de bien réfléchir avant de sortir quelque chose de sa bouche, de peur qu’elle n’engendre du mal à toute la communauté. N’oublions pas à cet effet que l’exil et l’asservissement cruel des enfants d’Israël en Égypte, étaient dus essentiellement à la calomnie et la médisance (Chémoth Rabah 1:30) : “Qu’est-ce que l’Éternel, ton D-ieu, te demande uniquement ?” (Deutéronome 10:12).
 
Si tu prends conscience du fait que tu n’es venu sur terre que pour l’explorer et rechercher constamment les mitswoth et les bonnes actions et t’en délecter, tu ne cesseras pas de t’attacher au Saint, béni soit-Il, et ta foi ne fera que s’intensifier. Tu pourras ainsi accéder à des niveaux spirituels exaltés.
 
Mais si tu n’exploites ce monde que pour ton bien personnel au lieu de servir Ton Créateur, si tu ne réussis pas à distinguer l’essentiel du secondaire, toute ta vie sera assaillie de doutes et tu ne connaîtras pas un moment de répit. La peur de l’avenir et toutes sortes d’appréhensions te rongeront parce que tu ne crois pas en quelqu’un qui veille constamment sur toi. Tu en arriveras, à D-ieu ne plaise, à renier Celui qui t’a créé. Tu ne pourras plus supporter ta vie et ta fin sera amère. C’est exactement ce qui s’est passé chez les explorateurs qui ont été saisis d’effroi par les géants et sévèrement punis (Sotah 35a).
 
Veuille l’Éternel que, par le mérite d’un langage raffiné et pur de toute médisance, grâce à l’attachement au Créateur et à Ses commandements, nous en arrivions à Le connaître dans toutes tes voies “BéKhOL DéRaKhéKha Da’EHOu”, qui a la même guématria (391) que “Ra’HaMiM GuéDOLIM”(“Miséricorde divine abondante”) et que “YéChOu’AH ”(“Salut”), au plus vite de nos jours. Amen !

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