Pleurer comme il faut !

On dit que quand on fait quelque chose, il faut le faire bien. Et vous savez quoi ? C’est vrai ! Oui, même s’il s’agit de… pleurer !

5 Temps de lecture

le Rav Shalom Arush

Posté sur 19.10.21

On dit que quand on fait quelque chose, il faut le faire bien. Et vous savez quoi ? C’est vrai ! Oui, même s’il s’agit de… pleurer !

Tant que nous n’avons pas le Temple à Jérusalem, la ville Sainte, nous devons vraiment ressentir la douleur de cette terrible destruction. Le Tikoun H’atsot, que l’on dit pendant la période des trois semaines, est une façon d’exprimer le manque et la douleur que l’on ressent par rapport au Temple qui a été détruit, et l’attente de notre délivrance complète, rapide et de nos jours, Amen.

Pendant les trois semaines –les jours durant lesquels a commencé la destruction du Temple, jusqu'à Tisha be Av (le 9 Av)- on a coutume d’être un peu en deuil, et le jour du 9 Av lui-même, nous disons des kinotes (lamentations), assis par terre, en pleurant de douleur pour la précieuse chose que nous avons perdue.

La Guemara nous dit que depuis la période de la destruction du Temple, il est interdit de rire de tout son cœur dans ce monde. Toutefois, cela ne signifie pas que nous devons être tristes, D.ieu préserve. L’homme doit savoir comment se comporter dans chaque domaine de sa vie, quand l’essentiel est de savoir comment servir D.ieu, à chaque instant, et quelle conduite adopter dans certaines circonstances. Car comme le dit Kohelet, le plus sage des hommes, il y a un temps pour chaque chose. Quand c’est le moment de se réjouir, il faut se réjouir. Quand c’est le moment de pleurer, il faut pleurer, mais pour la bonne raison ! Ces larmes doivent être des larmes de manque et de nostalgie, pas de ressentiment, pas de pleurnicherie ou de plainte. L’homme doit faire très attention à ne pas tomber dans le piège de la pleurnicherie, parce que c’est ce genre de pleurs qui a amené la destruction.

Les sages nous rappellent que la destruction du Temple ne signifie pas que nous devons afficher une mine sombre et des sourcils froncés, D.ieu préserve. Mais elle vient nous rappeler que nous devons toujours aspirer à corriger la cause qui a conduit à la destruction, savoir que nous avons perdu quelque chose de si précieux à cause de nos fautes ; nous devons donc nous languir et demander à Hachem Son aide pour corriger, de la racine, la principale raison pour laquelle nous sommes toujours en exil.

Le Talmud raconte l’histoire de Raban Gamliel, Rabbi Eléazar ben Azaria, Rabbi Yehoshua et Rabbi Akiva, quatre saints tannaïms, qui se trouvaient en route et entendirent de très loin les cris de joie et de débauche des Romains. Raban Gamliel, Rabbi Eléazar et Rabbi Yehoshua se mirent à pleurer, tandis que Rabbi Akiva se mit à rire.

« Pourquoi ris-tu ? Lui demandèrent-ils.

– Et pourquoi pleurez-vous ? Leur répondit-il.

– Comment ne pas pleurer, quand ces idolâtres se réjouissent alors que notre Temple brûle ?

– C’est la raison pour laquelle je ris.

– Explique-nous, s’il te plait.

– Si ces grands délinquants que sont les Romains se réjouissent, réussissent et sont heureux, quelle joie et quelle réussite attend ceux qui font vraiment la volonté du Créateur ? Il est évident que le peuple d’Israël aura le mérite d’une joie éternelle, bien plus que les Romains. » Expliqua Rabbi Akiva.

Rabbi Akiva était déterminé à ne voir que le bon dans toute situation, y compris après la destruction. Il a même vu le bon dans le fait que ceux qui irritent le Créateur puissent se réjouir de leur réussite, et parvint à en retirer le meilleur message. Il comprit que si les Romains, qui avaient irrité le Créateur, jouissaient d’une telle joie aux yeux de tous, alors en temps voulu, ceux qui réjouissaient le Créateur par leurs actes jouiraient d’une indescriptible bénédiction.

Rabbi Akiva nous enseigne que, même si nous avons le commandement de pleurer et d’avoir mal pour la destruction, nous devons le faire uniquement au moment où cela nous est permis : lors du Tikoun H’atsot du 9 Av. Et en dehors de cela, nous devons toujours être dans la joie. Toujours !

Le Talmud continue l’histoire de nos chers tannaïms, qui reprirent leur route jusqu'à arriver au Mont Scopus, d’où ils virent l’emplacement du Temple. Soudain, un renard sortit de l’endroit où se trouvait le Saint des Saints, et ils se mirent à pleurer, mais Rabbi Akiva rit.

« Pourquoi ris-tu, maintenant ?

– Et pourquoi pleurez-vous ?

– Comment ne pas pleurer ? Il est écrit sur cet endroit « L’étranger qui s’approchera périra », et des renards s’y promènent ! Comment ne pas pleurer ?

– C’est ce pourquoi je ris. »

Ce rire est une vision du monde. La destruction, la désolation qu’il avait devant les yeux, blessait autant le cœur de Rabbi Akiva que celui de Raban Gamliel, Rabbi Eléazar et Rabbi Yehoshua qui étaient avec lui. Mais dans ce moment de douleur, il distingua autre chose – le fait que la prophétie de la destruction, étroitement liée à la prophétie de l’espoir dans le futur, était en train de se réaliser de façon complète et précise.

Tant que la prophétie ne se réalisait pas, leur dit le grand tanna, on aurait pu attribuer cette difficile chute à des raisons purement logistiques, à des coïncidences militaires sur lesquels on n’a aucune emprise, à des processus historiques inévitables, à l’échec de certains gouvernants ou à la folie de certains dirigeants ; tout cela dans l’esprit des analystes et des commentateurs des évènements passés dans le monde (historiens, philosophes, érudits etc.) Mais si une prophétie a déjà été exprimée avant les faits et se réalise complètement et à la lettre, jusqu’au plus petit détail (voir Les Lamentations), alors une sorte d’énergie latente détermine la trajectoire des évènements. Preuve en est que la Torah met l’homme et la société en garde contre les oppositions et les rebellions qui les poussent en fin de compte vers un drainage qui s’opère de façon naturelle et qui est la source d’un rire de joie, même dans la douleur. Dans les ténèbres, se trouve un point de lumière. La dissolution de L’état juif, la dispersion du peuple à travers le monde, la perte du pouvoir, étaient tant de conditions nécessaires à une croissance régénérée, à une nouvelle opportunité de développement, sans l’influence des concepts précédents sur le cours de la vie.

Et c’est un message pour chacun d’entre nous, et essentiellement, pour savoir comment voir le monde. Tout, vraiment tout, doit se faire dans les bonnes proportions. Rabbi Akiva savait quand pleurer et quand rire et se réjouir. Et même lorsqu’il pleurait, ce n’était pas un pleur inutile ou relevant d’un manque de gratitude, ni un pleur de tristesse ou de désespoir, D.ieu préserve, mais des larmes d’attente et de manque.

Alors réfléchissons un instant, nous languissons-nous vraiment du Saint Temple ? Voulons-nous vraiment qu’il soit reconstruit ? Si oui, pourquoi continuons-nous à pleurnicher ??

Si nous pleurions vraiment la perte de notre bien le plus précieux, le Temple, il devrait déjà être reconstruit, non ?

Les sages nous enseignent que si le Temple n’est pas reconstruit à notre époque, c’est comme s’il venait d’être détruit. Comment est-ce possible ?

Le Créateur ne veut certainement pas que le Temple soit détruit à nouveau, c’est pourquoi Il ne le reconstruit pas, jusqu'à ce que nous le méritions vraiment. Et pour mériter le Temple, nous devons absolument revenir vers la vérité et la foi. Chacun d’entre nous doit s’efforcer de faire sa part et de ne pas retarder la délivrance du peuple d’Israël et la reconstruction du Temple. C’est par la foi et la gratitude envers le Créateur pour tout ce qu’Il fait pour nous – pour le bon comme pour ce qui nous parait mauvais, que nous pourrons atteindre ce noble objectif.

Par la joie, nous renforçons non seulement notre foi mais également notre capacité à aider les autres à se renforcer, à voir le bon dans chaque situation et à chaque moment. Et en retour, on donne à chacun d’entre nous le mérite de hâter la délivrance et la construction du Temple, rapidement et de nos jours, Amen.
 
 
 

Ecrivez-nous ce que vous pensez!

Merci pour votre réponse!

Le commentaire sera publié après approbation

Ajouter un commentaire