Maintenant… fermez les yeux !

La dimension immanente du concept de surveiller ses yeux est l'émouna (la foi). Cela signifie qu'une personne doit penser de la sorte : “Je vis avec Hachem (D-ieu) ; rien n'existe à l'exception de Lui ; conséquemment, que pourrait-il y avoir d'autre à regarder ?” Cette réflexion peut se poursuivre ainsi : “Chacun de mes mouvements doit correspondra à la volonté de D-ieu. Dans la mesure où D-ieu ne m'a pas ordonné d'ouvrir les yeux, il m'est interdit de les ouvrir. Cela correspond à l'enseignement du Rav Éliyahou Lapian z.ts.l., selon lequel Avraham Avinou (Avraham notre père) ne leva pas ses yeux – durant toute sa vie – au-delà des deux mètres qui se trouvaient devant lui, à l'exception des moments où il se trouvait tout seul. Ceci signifie suivre réellement la volonté de D-ieu.

C'est pour cela qu'à chaque fois où Avraham Avinou leva les yeux, une mention spécifique est faite dans la Tora (Bible). Ainsi, il est écrit à propos du “ligotage” d'Yits'haq (Béréchith 22:4) : “Le troisième jour, Avraham leva les yeux et aperçut l'endroit dans le lointain.” Cela signifie qu'Avraham leva ses yeux afin de déterminer où se trouvait la Chekhina (la Présence divine).

La fois suivante où Avraham Avinou leva ses yeux est lorsqu'il prit le bélier qu'il sacrifia à la place d'Yits'haq. Il est écrit dans la Tora (ibid. 22:13) : “Avraham leva les yeux et remarqua qu'un bélier, derrière lui, s'était embarrassé les cornes dans un buisson. Avraham alla prendre ce bélier et l'offrit en holocauste à la place de son fils.”

“Le troisième jour, Avraham leva les yeux, aperçut l'endroit dans le lointain.” Nos Sages ont enseigné qu'à cet instant, Avraham Avinou aperçut la Présence divine. De fait, le cœur d'Avraham était parfait, complet et en son fort intérieur il ne désirait qu'une seule chose : voir Hachem. Ainsi, lorsqu'il leva ses yeux, c'est exactement ce qu'il vit : la Présence divine !

À l'opposé, il est bon de relever que la même expression – “lever ses yeux” – est utilisée dans la Tora à propos du méchant Esaü. Cependant, que vit Esaü ? Le verset (ibid. 33:5) nous apprend qu'en “levant les yeux, il vit… les femmes.” Même si Esaü surveillait ses yeux – n'avait-il pas été élevé dans la maison d'un Tsadiq : son père Yits'haq Avinou ? – à l'intérieur de son cœur, il désirait voir des femmes. Par conséquent, c'est ce qu'il vit. Ceci correspond à ce qu'on dit nos Sages : “D-ieu nous emmène sur le chemin que nous désirons emprunter.”

Rabbi Ya'aqov Abu Chatzeira – que sa mémoire soit bénie – pose la question suivante : “Si tout commence avec les yeux, pour quelle raison la Tora indique-t-elle l'importance de ne pas suivre notre cœur avant de nous prévenir à propos de l'usage de nos yeux ? En effet, il est écrit (Bamidbar 15:39) “Ne vous égarez pas à la suite de votre cœur et de vos yeux, qui vous entraînent à l'infidélité.”

La réponse à cette question est évidente. Lorsqu'une personne vit avec émouna, il est certain qu'elle ferme ses yeux d'elle-même. Cette personne n'a nullement besoin d'un commandement spécifique pour ne pas suivre ses yeux. Cependant, nous devons prendre conscience que c'est le cœur qui nous incite à ouvrir les yeux. C'est pour cette raison qu'il est écrit : “Ne vous égarez pas à la suite de votre cœur et de vos yeux, qui vous entraînent à l'infidélité.”

C'est aussi pour cela qu'il est écrit (Devarim 11:16) : “Prenez garde que votre cœur ne cède à la séduction, que vous ne deveniez infidèles, au point de servir d'autres dieux et de leur rendre hommage.” Selon le Ba'al Chem Tov z.ts.l., dès l'instant où le cœur d'une personne “cède à la séduction” – c'est-à-dire lorsqu'une personne laisse son cœur la séduire pour n'importe quelles choses à l'exception de D-ieu – immédiatement, elle devient infidèle “au point de servir d'autres dieux et de leur rendre hommage.” La conséquence d'un tel comportement est que cette personne perd de suite son lien personnel avec l'émouna. Cette perte est considérée comme une véritable idolâtrie, même si la personne n'adore pas d'une façon explicite d'autres dieux.

Que recherchez-vous ?

Dans l'histoire de Rabbi Na'hman de Breslev, le vice-roi a fait un véritable effort dans le but de sauver la princesse. Cela est une preuve de son abnégation. De fait, il a traversé plusieurs déserts et forêts pendant un nombre important d'années. Il n'a pas abandonné son objectif, jusqu'au moment où il trouva la princesse dans le château. Pour autant, sa mission n'était pas encore terminée. Il devait encore choisir un endroit pour y rester une année entière, s'y languir d'elle et faire tout ce que la princesse lui avait demandé. Le dernier jour de l'année, il devait jeûner et ne pas dormir. Pour autant, alors qu'il est tout prêt du but – qu'il ne lui restait pratiquement qu'à tendre la main pour sauver la princesse – il échoue lamentablement ! Pourquoi ? Uniquement parce qu'il n'a pas gardé ses yeux fermés !

Monsieur le vice-roi : vous allez sauver la princesse ! Elle est l'émouna ! Fermez vos yeux ! Concentrez-vous sur votre objectif ! Que pouvez-vous bien regarder d'autre ? Que recherchez-vous d'autre que l'émouna ?

Le signe qui nous montre que le vice-roi n'est pas encore prêt à sauver la princesse (l'émouna – la foi) est qu'il pense qu'il existe encore quelque chose d'autre en plus d'Hachem (de D-ieu). C'est pour cette raison que le vice-roi regarde ce qui se passe autour de lui. S'il avait l'émouna, il ne regarderait personne. De fait, une personne qui a l'émouna s'aperçoit vite qu'il n'y a rien d'autre à regarder qu'Hachem. Cette personne en déduit d'elle-même qu'il n'y a donc rien d'autre à regarder.

Cela s'applique à chaque personne. Que recherchons-nous dans la vie ? Désirons-nous réellement l'émouna ? Voulons-nous vraiment savoir qu'il n'existe rien dans le monde à l'exception de D-ieu ? Dans ce cas, pour quelle raison déambulons-nous dans le monde avec les yeux grands ouverts ? Qu'y a-t-il réellement à regarder ? Si nous devons aller dans tel ou tel endroit… allons-y les yeux fermés ! De la sorte, nous serons prêts accéder à cette place sans oublier la présence d'Hachem…
 

À suivre…