Un corps sain, ce n’est pas tout !

Lorsqu’il s’agit de notre santé, nous faisons très souvent passer notre corps en premier, pourtant, notre esprit n’est pas moins important, il est même l’essentiel.

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le Rav Shalom Arush

Posté sur 05.04.21

 Lorsqu’il s’agit de notre santé, nous faisons très souvent passer notre corps en premier, pourtant, notre esprit n’est pas moins important, il est même l’essentiel. Le Rav Chalom Arouch nous explique.

On entend beaucoup parler ces derniers temps de cas de violence sur des personnes sans défense. De ceux qui se retrouvent aux urgences à ceux qui se font interner pour traiter leur santé mentale, c’est un phénomène très douloureux. Car une blessure de l’âme est une blessure de toute la personne !

Il y a un certain nombre de choses à savoir à propos du mental de l’homme, et pas seulement pour ces mêmes personnes qui se font interner, mais pour l’ensemble du genre humain.

Comme on le sait, la partie et l’élément le plus sensible de tout ce qui compose l’homme est son âme ! Elle est la partie essentielle qui définit sa qualité de vie, il faut donc bien s’en occuper, l’améliorer et la corriger constamment. Surtout quand on sait qu’un mal-être mental est quelque chose de très dur à vivre, bien plus dur qu’un mal physique à bien des égards.

Tout d’abord, tout le monde ne souffre pas de problèmes physiques – connus ou non. Par contre, pratiquement tout le monde souffre de problèmes mentaux à différents niveaux, des problèmes tangibles et qui influent énormément sur la qualité de vie de l’homme. Et vous vous demandez surement : comment se fait-il que tout le monde souffre de problèmes mentaux dans ce monde ? Il faut savoir que la colère, la jalousie, l’anxiété, le stress, les explosions de fureur et autres sentiments de ce genre – dont souffre la majorité de la population mondiale- sont des maladies mentales. Un homme bien dans sa tête sent que tout va bien dans sa vie, il est heureux, confiant et joyeux.

Les gens se sont habitués à cette réalité quotidienne d’angoisse mentale, ils ne se rendent pas compte qu’ils pourraient être sains d’esprit, heureux et joyeux en permanence. Ce phénomène témoigne combien l’exil dans lequel nous sommes – un exil essentiellement mental- est profond et obscur.

La faiblesse mentale et ses nombreux maux caractérisent notre époque. Dans le passé, même s’il y avait de grands dangers, on menait une vie de joie, on avait la volonté de vivre. Aujourd’hui au contraire, même en menant le mode de vie le plus aisé et paisible qui soit, on ne vit pas. Pourquoi ? Parce que les gens n’ont pas la joie de vivre. Ils n’ont pas la volonté de vivre. C’est une grande tribulation de la fin de l’exil : des âmes faibles et constamment mélancoliques.

Une des causes à la douleur que ressentent beaucoup de gens à notre époque est l’écart qu’ils constatent entre leurs attentes et la réalité. Un écart qui ne fait que croître. Un écart entre ce que l’homme s’imagine être capable d’atteindre dans sa vie et ce qu’il atteint réellement. Les médias et la publicité contribuent largement à ce phénomène en mettant en scène toutes sortes de personnages heureux, beaux, riches, doués, célèbres, qui « réussissent dans la vie », qui sont souriants (mais seulement dans la pub, car dans la vraie vie, il se peut qu’ils soient les plus tristes et déprimés qui soient !) Ajoutez à tout cela un joli décor, du maquillage, des beaux vêtements et, bien entendu, une bonne musique de fond, et voilà ! La parfaite illusion. Le public achète et commence à se ronger les sangs. Le bonheur présenté est imaginaire, et entre lui, la réalité et la joie : aucun lien. C’est ce qu’on appelle une illusion d’optique.

La publicité et son illusion de gens heureux font malheureusement beaucoup de victimes. Celui qui s’y méprend n’atteindra même pas un dixième de ce bonheur imaginaire. Et même les quelques-uns qui, extérieurement, s’en approchent, puisqu’ils sont eux aussi « beaux, riches, doués, célèbres » etc., ressentent plus que n’importe qui le mensonge et la tromperie qui se cachent derrière les lueurs de ce soi-disant bonheur. Au fond d’eux ils sont tristes, seuls et sans joie. Pourquoi ? Parce que le bonheur extérieur n’existe pas, c’est une illusion, une création imaginaire. Le bonheur et la joie authentiques sont des choses intérieures que l’on ne peut avoir le mérite d’atteindre que par un travail sur soi, sur les dimensions de l’âme.

De façon évidente, une maladie mentale est beaucoup plus dure à vivre qu’une maladie physique. Les gens qui souffrent de problèmes mentaux sont mis à l’écart de la société, éprouvent des difficultés à vivre dans une relation d’amour et d’union avec les autres, et pour les autres également : il est difficile de s’entendre avec eux. Au contraire, dans le cas de la maladie physique, le patient a généralement des relations sociales, des amis et des proches qu’il aime et qui l’aiment, qui viennent lui rendre visite et lui faire plaisir. Même dans les moments où ses souffrances grandissent, il s’accroche à l’espoir et renforce son envie de continuer à avancer et à vivre. Il sait qu’il a une chance de guérir. En revanche, le malade mental perd tout lien avec la société. Sa vie est vide d’amour, de communication, de discutions. Il vit seul dans son monde imaginaire, ce que le Zohar (la Cabale) appelle un monde de séparation. Il croit que tout le monde pense du mal de lui, qu’on ne le comprend pas etc. C'est bien évidemment un terrible châtiment et dans la plupart des cas, ces personnes perdent leur volonté de vivre, ils n’ont pas la joie de vivre et ne ressentent aucun moment de bonheur. Il n'y a rien de pire que cela.

En hébreu ancien, un malade mental était appelé « frappé par D.ieu ». C’est la punition la plus sévère qui soit, car une telle maladie signifie être condamné à une vie de souffrance permanente, à une âme tourmentée et des pensées de déceptions imaginaires, qui ne correspondent pas à la réalité et à la société. De plus, même s’il existe certaines maladies physiques qui sont difficiles à guérir, globalement on voit un certain pourcentage de succès de la médecine pour soigner ou en tout cas, réduire la douleur ; et le corps lui-même le pouvoir de se guérir et de s’adapter à certaines situations. Ainsi, pour un patient malade physiquement, il y a pratiquement toujours l’espoir d’un remède.

Ce n’est pas le cas pour les maladies de l’âme, auxquelles la médecine n’a pas encore trouvé de remède. La plupart des malades restent avec leurs problèmes, qui empirent en général avec le temps. L’âme n’a pas non plus la faculté de se soigner par elle-même : c’est justement le contraire, elle va en se détériorant. Donc la plupart des malades mentaux prennent toutes sortes de cachets – un phénomène devenu très courant- et sans cela, ils ne sont pas en mesure de fonctionner normalement. Et je ne parle pas que de ceux qui souffrent de maladies mentales classées graves, pour lesquelles les cachets sont indispensables, mais je parle aussi de gens ordinaires qui souffrent de dépression, d’anxiété, de stress ; des gens qui m’ont confié ne pas pouvoir s’imaginer vivre un jour sans ces antidépresseurs. Certes, les gens malades physiquement sont souvent dépendants d’un certain médicament, mais les cachets qui viennent calmer des phénomènes mentaux influent sur l’esprit en réduisant son dynamisme, ou endorment l’homme et limitent sa vitalité car l’âme est l’essence de l’homme. (Ce n’est pas le cas pour les médicaments qui traitent un mal physique.) Le plus souvent, l’âme est touchée imperceptiblement et l’homme peut « fonctionner » normalement par ses pensées, sa créativité etc.

Une maladie mentale, même bégnine, est plus dure qu’une maladie physique car on ignore comment la traiter et elle ne fait que s’aggraver avec le temps.

Reconnaitre la maladie – la première étape de la guérison

Une autre des difficultés d’une maladie mentale en comparaison avec une maladie physique, est que le malade physique est conscient de ce dont il souffre et va donc faire des efforts, spirituels comme matériels, pour se soigner. C’est bien connu que reconnaitre sa maladie est une étape primordiale du processus de guérison. Mais les gens qui sont atteints mentalement nient le plus souvent leur problème, et refusent d’admettre qu’ils sont malades. Au contraire, ils sont persuadés que tout va bien et que le monde qui les entoure est dans l’erreur. Il leur manque ce point de départ vers la guérison, reconnaitre qu’ils sont malades et qu’ils ont besoin d’un traitement.
Donc dans la plupart des cas, le moyen employé pour guérir les malades mentaux est l’artifice, comme nous l’a enseigné Rabbi Nah’man de Breslev dans Le prince et le dindon. Un jour, le fils d’un roi tomba dans la folie : il disait être un dindon, qu’il devait s’asseoir nu sous la table et y manger des miettes de pain et des os. Et tous les médecins avaient baissé les bras. Et le roi se trouvait dans une grande tristesse. Jusqu'à ce que vienne un grand sage et déclare qu’il s’engage à guérir le prince. Comme le prince, il se déshabilla et le rejoint sous la table pour y grignoter des os et de miettes. Le prince lui demanda : « Qui es-tu et qu’est-ce que tu fais ici ? » Le sage lui répondit : « Et toi ? Qu’est-ce que tu fais là ? » Le fils du roi répondit : « Je suis un dindon ». Et le sage de rétorquer : « Moi aussi ». Et ils restèrent ainsi quelques temps jusqu'à s’habituer l’un à l’autre.  

Puis le sage fit signe aux membres de la famille de leur jeter des chemises, et il dit au prince : « Tu penses qu’un dindon ne peut pas porter de chemise ? On peut très bien porter une chemise et malgré tout, être un dindon. Parce qu’une fois, j’ai vu des dindons qui portaient des chemises. » Et ils s’habillèrent tous les deux avec les chemises. Apres quelques temps, il fit signe qu’on leur envoie des pantalons, et dit au prince : « Tu crois qu’en portant un pantalon, on ne peut pas être un dindon ? » Jusqu'à ce qu’ils passent les pantalons. Et ainsi de suite pour tous les vêtements. Plus tard, il fit signe qu’on leur envoie un peu de la nourriture qui était sur la table et dit : « Tu penses que si tu manges de la bonne nourriture, tu n’es plus un dindon ? On peut bien manger et rester quand même un dindon ! » Ils mangèrent et il lui dit : « Tu crois qu’un dindon est obligé d’être sous la table ? On peut être un dindon et s’asseoir à côté de la table ! » Ainsi agit-il avec lui jusqu'à le guérir complètement.

Un malade mental résonne ainsi : plus il est malade, plus il est convaincu d’avoir raison. Il s’en remet complètement à son imagination comme étant sa réalité, et il annule ce que son entourage lui dit être la réalité. Et je parle ici de beaucoup de gens « normaux » -qui se promènent dehors et pas dans un asile de malades mentaux- qui souffrent de cette terrible maladie. Et on peut dire que c’est là le cœur de la maladie mentale : nier, rejeter l’opinion des autres qui, premièrement, arrive toujours au moment où l’on doit l’entendre, et deuxièmement, a pour but de nous aider à voir la vérité. Comme l’écrit Rabbi Nah’man dans une de ses sih’otes (discutions) : si le fou écoute l’homme sain d’esprit, il deviendra sain lui aussi, mais au lieu d’écouter, il obéit à ses propres folies…

Et la folie, selon Rabbi Nah’man, c’est tout ce qui relève de l’arbitraire, de l’imagination, c’est le sentiment de « je » etc.

Ce « je », c’est l’orgueil de l’homme qui n’est pas disposé à accepter d’avoir tort. C’est pourquoi on ne peut soigner la plupart des malades mentaux que par des artifices, comme dans le conte ci-dessus. Les médecins ont échoué car ils sont allés contre la folie du prince qui s’est, en retour, opposé à eux de toutes ses forces, puisque c’est le principe de la folie : vouloir rester sur ses positions et rejeter les opinions des autres. Mais le sage authentique n’a pas essayé de lutter contre la folie du prince, au contraire, il alla dans son sens, comme s’il l’approuvait, et c’est ainsi qu’il réussit tout doucement à lui enseigner des concepts traditionnels sans qu’il s’en rende compte. C’est de cette façon qu’il faut agir avec un malade mental. C’est une très grande sagesse, profonde, qui demande beaucoup d’attention et de prudence, et l’on trouve difficilement toutes ces choses en une même personne, c’est pourquoi on n’entend très peu de cas de succès dans le traitement des maladies mentales.

Puissions-nous tous mériter une réfoua (guérison) complète du corps et de l’âme, Amen.
 

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