Rester attaché à son peuple – Miqetz

Il est des juifs qui se proclament tels mais n’hésitent pas pour autant épouser des femmes non juives. Ils doivent savoir que non seulement...

7 Temps de lecture

le Rav David Hanania Pinto

Posté sur 06.04.21

Ya’aqov leur père leur dit : ‘Vous m’arrachez mes enfants ! Yossef a disparu, Chim’on a disparu, et vous voulez m’ôter Benyamin !’” (Béréchith 42:36)

Rachi cite le Midrach (Béréchith Rabah 91:9) : “Il les soupçonnait de vouloir tuer ou vendre Benyamin, comme ils avaient vendu Yossef.”
 
La vente et le récit de la tunique entachée de sang auxquels Ya’aqov fait allusion maintenant nous montre qu’il les soupçonne, ce qui est nouveau. Il faut se demander pourquoi il ne croit pas leur récit.
 
Citons tout d’abord quelques-uns des versets qui traitent de ce sujet, ce qui nous permettra de comprendre clairement tout cet épisode.
 
Il est écrit (Béréchith 37:33-35) : “Il s’écria : ‘C’est la tunique de mon fils ! Une bête féroce l’a dévoré ! Yossef, Yossef a été mis en pièces !’ et il refusa toute consolation et dit : ‘Non ! Je rejoindrai, en pleurant, mon fils dans la tombe !’ Et son père continua de le pleurer.” Par la suite, lorsqu’ils durent aller acheter du blé en Égypte, il est écrit (ibid. 42:2) : “J’ai ouï dire qu’il y a du blé en Égypte. Allez-y, achetez-nous du blé et resterons en vie au lieu de mourir.” Et effectivement les dix fils de Ya’aqov descendirent en Égypte sur la demande de leur père (ibid. 42:3) pour y acheter de quoi se nourrir.
 
Dans les versets qui relatent la vente de Yossef et la douleur de Ya’aqov, ce qui n’est pas dit va bien au-delà de ce qui est dit.
 
Pourquoi le deuil de Ya’aqov est-il si grand ? Il a confiance en D-ieu et il sait que tout ce qui est arrivé vient de Lui. Que craint-il ? Comment se fait-il qu’il soupçonne les frères ? Ne sait-il pas que “celui qui soupçonne un innocent est puni” (Chabath 97a) ? Il est certain que les frères, “chefs des tribus d’Israël” sont des hommes sans défauts, vertueux et justes. Comment les soupçonner sans preuve et sans raison ?
 
En outre, après la vente de Yossef, Ya’aqov perdit l’inspiration divine. Comment dont pouvait-il savoir que ses fils, chefs des saintes tribus d’Israël, étaient coupables (puisque D-ieu ne le lui avait pas révélé) ? Il faut aussi expliquer pourquoi les dix frères de Yossef descendent en Égypte acheter du grain. Un seul ou deux auraient pu accomplir cette mission.
 
Les Sages nous disent (Chabath 89b) : “Ya’aqov aurait dû descendre en Égypte enchaîné dans des fers mais son mérite le protégea.” Les frères n’ont pas pensé un seul instant à la peine qu’ils allaient causer à Ya’aqov, leur père, lorsqu’ils lui annonceraient la perte de son fils, et combien il serait difficile de le consoler.
 
Ya’aqov de son côté aurait certainement préféré descendre en Égypte, même enchaîné dans des fers, afin de réaliser la prophétie “ta descendance … sera asservie et opprimée pendant quatre cents ans.” Ce n’est que lorsqu’il apprit que Yossef était en vie que “a vie revint au cœur de Ya’aqov, leur père.” (Béréchith 45:27)
 
Ya’aqov servait D-ieu dans la douleur, à cause de l’annonce de la mort de Yossef, d’autant plus qu’il avait reçu de D-ieu l’assurance que “si aucun de ses fils ne mourrait de son vivant, il ne verrait pas l’enfer” (Tan’houma Vayigach 9). Il refusait de se laisser consoler, il craignait qu’un manque de perfection ne l’empêche de devenir “un soutien pour la Présence Divine” (Béréchith Raba 47 : 8). Si tout cela devait lui échapper, ce serait signe qu’il était en faute, si bien qu’il s’écria : “Je rejoindrai mon fils dans la tombe !” tant sa peine et son deuil étaient grands à la pensée qu’il en était la cause.
 
Nous pouvons ajouter, à propos du verset “assurément (akh) il a été dévoré” (Béréchith 44:28), que le mot “akh” exprime toujours une restriction (Pessa’him 5a), ce qui nous indique que Ya’aqov ne sait pas avec certitude si son fils a été dévoré par une bête sauvage ou non, et c’est la raison pour laquelle il refuse toute consolation.
 
Les Sages disent même : “C’est une loi que le défunt est oublié, puisque l’on n’accepte pas de consolation pour quelqu’un qui est en vie” (Béréchith Rabah 84:21). Yossef est peut-être en vie, et dans ce cas, Ya’aqov peut continuer à prier pour que D-ieu dans Sa bienveillance lui fasse retrouver son fils, et alors il saura que sa couche a été parfaite. Ya’aqov n’a jamais perdu l’espoir de retrouver son fils Yossef en vie.
 
Nous pouvons comprendre pourquoi Ya’aqov hésitait tellement à envoyer son fils Benyamin en Égypte, comme il dit : “Vous voulez m’ôter Benyamin !” (Béréchith 42:36). C’est que “toutes les routes sont dangereuses” (Béréchith Rabah 91:9). Ya’aqov craignait “qu’un malheur lui arrive en route et vous ferez descendre, sous le poids de la douleur, mes cheveux blancs dans la tombe” (Béréchith 42:38). Si Benyamin devait mourir, c’est que la couche de Ya’aqov n’aurait pas été parfaite.
 
Nous voyons là combien de souffrances l’homme est prêt à accepter, pourvu que la Présence Divine ne le quitte pas. C’est ce que dit David HaMelekh (Téhilim 51:12-13) : “D-ieu a créé en moi un coeur pur et fait renaître dans mon sein un esprit droit. Ne me rejette pas de devant Ta face, ne me retire pas Ta sainte inspiration.” C’est-à-dire : D-ieu m’a donné un coeur pur afin que je ne faute pas et un esprit droit afin que je puisse supporter les souffrances, pour qu’Il ne me rejette pas loin de Lui, qu’Il ne me prive pas de Sa sainte inspiration.
 
C’est un fait connu qu’il est des juifs qui se proclament tels mais n’hésitent pas pour autant épouser des femmes non juives. Ils doivent savoir que non seulement la Présence Divine les abandonne lorsqu’ils s’éloignent du D-ieu d’Israël, mais ils mettent en grand danger le peuple tout entier et, surtout, ils font souffrir leurs parents de la douleur de voir leurs enfants quitter leur peuple “pour aller brouter dans des champs étrangers.”
 
De tels parents préfèreraient mourir plutôt que de voir leurs enfants s’assimiler à des peuples étrangers. De tels enfants sont coupables d’égoïsme, n’ayant agi ainsi que pour satisfaire leurs propres désirs, sans penser à la douleur et aux souffrances dont ils sont la cause.
 
Lorsque D-ieu vit la douleur de Ya’aqov qui aspirait à la perfection, Il lui restitua, dans Sa grande bonté, un peu de l’inspiration divine, comme il est écrit (Béréchith 42:1) : “Il vit qu’il y avait vente de blé en Égypte.” 
 
Les Sages remarquent (Béréchith Rabah 91:6) : “Par inspiration divine, il vit qu’il y avait de l’espoir du côté de l’Égypte” (la valeur numérique du mot “chever”, compté avec le mot lui-même, est la même que celle de l’expression : “Son fils Yossef, un juste fondement”). Le mot “chever” (“brisure”), indique que Ya’aqov informa ses fils qu’il n’y avait pas lieu d’avoir peur en Égypte, puisqu’il s’y trouvait quelqu’un appartenant à notre peuple.
 
En apprenant que son fils Yossef était en vie, qu’il était le gouverneur de toute la contrée (Béréchith 42:6), la vie revint dans le cœur de Ya’aqov (Béréchith 45:27) et Rachi explique : “L’inspiration divine qui s’était séparé de lui, lui revint.” Ya’aqov craignait que sa couche n’ait peut-être pas été totalement pure, et que pour cette raison la Présence Divine l’avait quitté. Mais à présent, en apprenant que Yossef était le gouverneur de l’Égypte et qu’il était resté vertueux, il comprit qu’il n’en était rien, et la preuve en est que l’inspiration divine lui fut restituée.
 
Lorsque l’inspiration divine lui revint, il sut aussi que ses fils, ceux qui avaient vendu Yossef, avaient préparé la descente en Égypte, et que leur intention avait été pure, puisque D-ieu Lui-même avait pris part au serment de ne pas révéler à Ya’aqov la vérité. Yits’haq, qui savait que Yossef était vivant, n’a rien dévoilé non plus, se disant : “Si D-ieu ne le fait pas savoir à Ya’aqov, vais-je moi révéler ce secret ?” (Béréchith Raba 84:21). Pour quelle raison, jusque-là, Ya’aqov soupçonnait-il ses fils ?
 
Tout le monde sait que les bienfaits de ce monde n’adviennent que grâce au mérite des Justes, et le monde jouit de la prospérité grâce à eux, comme il est dit (Zohar III, 216b) : “Le monde entier ne se nourrit que grâce au mérite de Mon fils ‘Hanania.” Effectivement, Ya’aqov crut tout d’abord que son fils était mort, et il en porta le deuil. Mais par la suite, voyant que l’Égypte jouissait de la prospérité matérielle et spirituelle, il comprit que c’était grâce à Yossef.
 
Effectivement, c’est Yossef qui conseilla à Pharaon de mettre en réserve les récoltes, lui disant (Béréchith 41:35) : “Qu’on amasse toute la nourriture des années fertiles…” Ya’aqov n’avait plus de doute que son fils fût vivant et qu’il fût resté vertueux, comme en témoignent les Sages, et il n’avait donc plus de raison de soupçonner ses fils de la vente de Yossef. Il comprit que tout avait été motivé par des intentions pures, afin de préparer la descente des Enfants d’Israël en Égypte.
 
Maintenant, nous pouvons expliquer pourquoi Ya’aqov envoya ses dix fils (sauf Benyamin) en Égypte. La joie fut très grande dans la maison de Ya’aqov lorsqu’il annonça qu’il y avait vente de blé en Égypte, non pas qu’ils aient manqué de subsistance, puisque nous savons qu’ils avaient encore des récoltes, mais parce que l’inspiration divine fut restituée à Ya’aqov et il se préparait déjà à rencontrer Yossef. Il envoya donc tous ses fils faire la paix avec Yossef et se faire pardonner, et finalement, il envoya aussi Benyamin pour que tous les frères soient réunis.
 
S’il n’y avait pas eu de famine en terre de Cana'an, les fils de Ya’aqov n’auraient pas pu descendre en Égypte chercher Yossef sans éveiller les soupçons de leur père. La famine obligea les frères à descendre en Égypte, ce qui leur donna un prétexte pour chercher Yossef sans éveiller les soupçons de Ya’aqov.
 
Yossef aussi savait tout cela. C’est pourquoi, quand il rencontre ses frères et se confesse à eux, il est écrit (Béréchith 45:1) : “Yossef ne pouvait plus se contenir.” Yossef voulait en finir avec l’exil. Comment ?
 
Citons le Pitou’hey Hotam (page 88), concernant ce verset : “Il est possible qu’il y ait là une indication de la fin des temps. Toutes les dates sont passées et nous attendons toujours, et D-ieu aussi attend. Nos yeux sont tournés vers Lui afin qu’Il nous prenne en pitié, et Lui attend le moment où Il nous ramènera à Lui et Il est en peine pour nous et pour Sa propre gloire. C’est l’attribut de Justice qui cause le retard, mais nous avons confiance qu’Il sauvera le peuple de Son héritage et nous dévoilera Sa Présence.
 
Tel est le sens du verset 'Yossef ne pouvait plus se contenir." Ce verset indique notre long exil, et parle au cœur des Enfants d’Israël, leur enjoignant de ne pas perdre espoir.”
 
Dans le même sens, les Sages disent : “Ra’hel fut l’une des premières prophétesses. Elle pria pour mettre un terme à l’exil, comme il est dit : 'Ra’hel pleure pour ses enfants…' (Yérémia 31:15).” Elle savait que la rédemption ne viendrait qu’après six mille ans, qui correspondent aux six jours de la création du monde, et que la permanence du monde ne dépend que de l’attribut de Miséricorde, bien que l’attribut de Justice domine. C’est pourquoi elle appela son fils Yossef, indiquant par ce nom la fin de l’exil.
 
Le Nom de D-ieu est indiqué dans les premières lettres des mots “Yossef ne pouvait plus (vélo Ya’hal Yossef)” (Vav, Youd, Youd = 26), et les dernières lettres forment le mot “élef ” (“mille”). Dans le sixième millénaire D-ieu amènera la rédemption. Ainsi, Yossef indiqua à ses frères l’approche du temps de la rédemption, et la venue du Messie.
 
Quelle est la voie à suivre ?
 
Chacun doit s’efforcer de ne pas chasser la Présence Divine et de ne pas causer les souffrances et les peines qui sont la conséquence des mariages mixtes et de l’assimilation, choses qui sont sévèrement punies. Il faut rester attaché au peuple de D-ieu et à Son héritage, de façon à être heureux en ce monde et dans l’autre monde.

Ecrivez-nous ce que vous pensez!

Merci pour votre réponse!

Le commentaire sera publié après approbation

Ajouter un commentaire